Banlieues
Catégorie : Global
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Le gouvernement a plongé dans les inépuisables ressources de l’État, il a sorti du tiroir la loi du 3 avril 1955 qui servit d’abord contre les combattants indépendantistes et les civils arabes en Algérie occupée. La continuité de l’État colonial français n’est plus à démontrer. Les Chirac, Sarkozy, Villepin dressent la violence de l’État bourgeois, organisée, expérimentée, face à la colère désorganisée d’une jeunesse écrasée par les conséquences de sa politique antiouvrière. Des hélicoptères, des milliers de CRS et de gendarmes sont déployés dans les cités pauvres ; des milliers d’arrestations ; les comparutions immédiates pleuvent avec déjà 364 condamnations à des peines de prison ferme. Le couvre-feu, les perquisitions de jour et de nuit, l’interdiction de se réunir donnent tout son éclat au « modèle social français » : il vaut quand les pauvres se taisent.
Les organisations d’origine ouvrière, partis et syndicats, ont montré une fois encore leur faillite. Aucune n’a appelé la population laborieuse à manifester contre le gouvernement et sa police, après la mort de Zied Benna et de Bouna Traoré qui fuyaient un énième contrôle au faciès. Deux adolescents de 14 et 17 ans électrocutés, aussitôt accusés par le ministre de l’Intérieur d’avoir participé à un cambriolage, ce qui est un mensonge. Ni le PS, ni le PCF, ni les organisations syndicales n’ont décidé d’organiser la légitime exaspération des jeunes des quartiers populaires de Clichy, leur révolte spontanée en apprenant la mort de Zied et Bouna. Ils les ont laissés seuls face à la police.
Pire, PS et PCF ont communié dans la demande de « rétablissement de l’ordre républicain », dès que la contagion de la colère s’est propagée dans les cités de la banlieue parisienne, puis en province :
Le gouvernement se montre incapable de rétablir l’ordre public. (CEN du PCF, 4 novembre 2005)
Le jour où Villepin annonçait l’application des lois d’exception, d’agression contre les banlieues ouvrières, Ayrault, à l’Assemblée nationale, a déclaré « s’imposer un pacte de non agression à l’égard du gouvernement ». Le président du groupe des députés PS s’est dit « pas hostile par principe au couvre-feu ».
Avant toute chose, il est impératif de rétablir l’ordre et la sécurité. (Hollande, premier secrétaire du PS, 8 novembre)
L’Humanité du 8 novembre se contente de citer les mesures annoncées par Villepin la veille, sans réclamer la levée immédiate de l’état d’urgence ; les communiqués CGT et FO sont également muets sur cette exigence minimum, comme le PT qui « exprime sa plus vive préoccupation » !
À l’unisson, PS, PCF, LCR, LO, réclament le renforcement des dispositifs anti-explosion chargés de contenir la misère sociale :
Mise en place immédiate de dispositifs de police de proximité, de partenariats entre tous les acteurs concernés : police, gendarmerie, justice, élus locaux… (CEN du PCF, 4 novembre 2005)
Il n’y a pas, dans les quartiers dits sensibles, plus de police de proximité ou de postes de police permanents. (Lutte Ouvrière, éditorial, 4 novembre 2005)
Que demandent les maires ? Ils demandent des services publics immédiats, une présence de la police, pas simplement quand il y a des incidents, une police permanente. (Hollande, France 2, 7 novembre)
Les partis réformistes et leurs acolytes se retrouvent systématiquement du côté de la défense de l’ordre bourgeois. Ils ont, entre autres, appelé à voter Chirac, accepté Vigipirate, soutenu la loi discriminatoire contre le voile. Les bureaucraties syndicales qui leur sont liées isolent les grèves (comme à la RTM) quand elles ne les trahissent pas directement (SNCM), égrènent les journées d’action impuissantes, dévoient le mécontentement du prolétariat dans une demande incessante de « négociations » avec le gouvernement Chirac-Villepin-Sarkozy, comme si ce dernier avait la moindre intention de changer sa politique, de cesser de porter des coups et de répondre favorablement aux revendications ouvrières. En relais des réformistes qui n’ont plus l’oreille de la jeunesse, les curés et les imams, prônent la résignation et les manifestations silencieuses quand les pauvres crient vengeance.
Il y a au moins 5 millions de chômeurs et de travailleurs en très grande précarité en France. Les entreprises d’intérim sont devenues les plus gros employeurs de main d’œuvre. 25 % de la population, 50 % des jeunes de moins de 26 ans, sont totalement privés d’emploi dans les cités les plus pauvres d’Ile de France, de Picardie, du Nord-Pas de Calais. Seul un travailleur sur deux est indemnisé alors qu’il est exclu du travail. Des dizaines de milliers de prolétaires, terrorisés par la menace d’une arrestation, sont contraints de travailler sans couverture sociale, pour de très bas salaires, parce qu’ils ont fui la répression ou la misère dans leur pays d’origine. 759 980 accidents du travail ont été recensés pour une année dont une augmentation de 3,8 % des accidents graves entraînant une incapacité permanente. 1950 cancers déclarés par des ouvriers exposés à l’amiante.
Une discrimination féroce sévit à l’embauche contre les jeunes diplômés ou non, dès qu’ils portent un nom à consonance arabe ou africaine. Les mêmes essuient les contrôles policiers, les insultes du premier flic de France, Sarkozy. Dans les ZEP, le taux d’échec à l’école est deux fois supérieur à la moyenne nationale : Villepin annonce la mise en apprentissage dès 14 ans. Des familles sont à la rue, privées de logement parce que l’État leur refuse des papiers, les expulse ou parce qu’elles n’ont pas les moyens de payer des loyers en hausse permanente. D’année en année, des quartiers entiers sont laissés à l’abandon, logements et immeubles dégradés, transports insuffisants, infrastructures de services à la population réduites : on compte deux fois moins d’établissements de santé qu’ailleurs, avec cinq fois plus de personnes affiliés à la CMU.
Cette violence-là ne fait pas la une des médias, pourtant elle assaille quotidiennement des millions de travailleurs et de jeunes. Elle résulte du maintien du mode de production basé sur le profit pour une minorité. Ce désordre permanent pour la majorité de la population découle des lois capitalistes. Aucune « politique de la ville » avec les démolitions de logements sociaux qui rejettent les pauvres plus loin encore, les « zones franches » où ils devraient travailler à pas cher pour des patrons exonérés, ne le résoudra. Seule une révolution prolétarienne, expropriant les capitalistes pour avoir le pouvoir de répartir le travail entre toutes les mains, pour produire et distribuer en fonction des besoins de la population laborieuse, liquidera les injustices sociales.
C’est avant tout contre cette possibilité que la police, de proximité ou pas, détient avec l’armée le monopole de la détention d’armes ; c’est avant tout contre la classe ouvrière qui a la puissance sociale potentielle de renverser le système capitaliste que les corps répressifs sont organisés : intervention du GIPN contre les postiers grévistes de Bègles, du GIGN contre les marins grévistes de la SNCM, des CRS contre les mal-logés, contre les travailleurs qui essaient d’empêcher leurs licenciements ; juges du tribunal d’instance déclarant « illégale » la grève des traminots de Marseille ; menace de réquisition des grévistes ; condamnations d’étudiants et de lycéens après les manifestations contre la loi Fillon ; annonce de l’expulsion des étrangers même en situation régulière s’ils ont été condamnés… La dissolution de l’ensemble des forces de répression, des tribunaux de la « justice » bourgeoise qui condamnent les manifestants et amnistient les patrons et les ministres, sera une des tâches de salubrité publique que remplira la révolution ouvrière. Rien n’est plus urgent que de s’organiser pour aider à sa victoire.
Construire une organisation révolutionnaire de la jeunesse, construire le parti ouvrier révolutionnaire
La trahison des organisations qui dirigent le prolétariat laisse les travailleurs et les jeunes dans l’impuissance face au gouvernement du capital. Les défaites subies (deuxième guerre impérialiste déclenchée contre l’Irak, vague de licenciements massifs, retraites amputées et retardées, atteinte au droit de se soigner et de s’instruire, privatisations…) à cause de leur politique de collaboration permanente avec le capital et ses agents laminent le niveau de conscience politique du prolétariat et de la jeunesse, en particulier d’une fraction qui n’entrevoit aucun avenir. Des exemples de ce déboussolage sont donnés par les incendies de voitures des travailleurs des quartiers populaires par leurs enfants et leurs voisins, par les destructions d’écoles, de gymnases ou d’autobus, par l’assimilation des pompiers aux flics… Ces actes qui se trompent d’ennemis font oublier les vrais responsables : la classe capitaliste, les Chirac-Sarkozy-Villepin et tous les gouvernements qui les ont précédés. Ils ont pour conséquence un renforcement du dispositif répressif avec l’aval d’une grande fraction de la population. Les réformistes portent la responsabilité de cette division des rangs des prolétaires.
À tous les jeunes justement révoltés par l’ordre bourgeois, le chômage, les ségrégations, le racisme, le Groupe bolchevik propose la tâche de construire une organisation révolutionnaire capable de combattre pour leurs légitimes revendications, levant le drapeau rouge des humiliés et des opprimés, renouant avec les luttes ouvrières menées par leurs parents et grands-parents, de toutes origines, de toutes couleurs.
À tous les jeunes, tous les prolétaires justement dégoûtés par les trahisons des organisations réformistes, des phraseurs « d’extrême gauche », il faut construire un parti ouvrier révolutionnaire dont le programme est la dictature du prolétariat, la liquidation de l’Etat bourgeois et de ses institutions, l’expropriation des capitalistes, le contrôle ouvrier pour organiser la satisfaction des immenses besoins de la population, la collaboration entre les prolétariats de tous les pays.
_ Le 13 novembre 2005
Site :www.revolution-socialiste.info
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