entretien avec sylvie, factrice à la poste
Publié le , Mis à jour le
Catégorie : Global
Thèmes : Coronavirus
Lieux : Toulouse
Le 03/04/2020
Quel est ton travail ?
Je suis factrice. C’est-à-dire distribution du courrier et des colis.Je suis en CDI.
Est-ce que tu peux nous raconter plus en détail ce que tu fais ? Comment s’organise ta journée, quelles sont les missions que l’on te donne, avec quelles contraintes horaires, physiques, avec quel rapport à la hiérarchie ?
En France on distribue le courrier six jours sur sept. Le samedi c’est principalement pour de la presse. Le matin, on arrive, ça commence par des travaux collectifs (comme le tri), ensuite, on part sur notre tournée pour la distribution. Quand on revient,on rend compte de la distribution ou non des objets recommandés, des objets avec signature, éventuellement des services facteurs (comme aller voir des personnes âgées, ou d’autres prestations).
On a des horaires précis, et on doit attendre la fin de la vacation, même si on a fini notre travail en avance, depuis qu’il peut y avoir des visites de l’inspection du travail.
Avant, quand tu avais fini ton travail, tu pouvais rentrer chez toi. Mais depuis, il y a eu des changements de statuts et ils sont à cheval sur le respect des horaires. Enfin, pour partir du travail, parce qu’il faut se battre pour se faire payer les heures supplémentaires. Mais en ce moment avec les conditions sanitaires,c’est idiot de garder des gens alors qu’ils ont fini de travailler.
… Ça c’est depuis quand ?
C’est pas très vieux, ça fait deux ans. Le changement de statut de la Poste en entreprise privée s’est fait sur des décennies. Il y a quand même toujours des obligations vis-à-vis de l’État.
Dans ton bureau, tu peux nous dire combien il y a de personnes qui travaillent ? Comment est-ce qu’il est constitué, au niveau du nombre de travailleurs, du nombre de cadres ? Est-ce que tu peux donner une petite description géographique des lieux dans lesquels tu travailles ?
Dans un bureau comme le mien c’est à dire avec 45 tournées, on est une petite centaine de personnes à travailler (équipe de facteurs et remplaçants, facteurs qui supervisent les équipes, équipe spécialisée “entreprises” et l’équipe des services recommandés et autres prestations). Pour ce qui est de l’encadrement, nous en ce moment on a trois chefs d’équipe. Une chef des ressources humaines, un directeur d’établissement et un second.
Quand tu parles de chef d’équipe, est-ce qu’il travaille avec vous ?
Il fait partie des encadrants de proximité, ceux qui sont vraiment juste après les salariés, qui ont la plus sale position parce qu’en tant qu’encadrants, ils font tampon, ils ont la pression.
C’est plutôt d’anciens facteurs ou ils viennent directement de formation ?
Jusque là c’était souvent d’anciens facteurs, les gens gravissaient les échelons petit à petit. De plus en plus, on voit débarquer des gens qui sortent de l’école, qui n’ont pas fait de travail de terrain.
Avant de parler du Covid, est-ce que tu peux me donner l’ambiance dans ton bureau, parler des rapports entre les travailleurs, l’encadrement et la direction. Les luttes récentes auxquelles tu as participé ? Et de manière plus large, nous indiquer les conflits encore existants en France au sein de la Poste ?
Sur mon bureau, le dernier grand conflit c’était celui à la Poste avant 2000 (pour l’ouverture à la concurrence). Après il y a toujours des occasions de conflits selon les bureaux. Tous les deux ans, il y a des réorganisations, ce qui sous-entend des nouvelles procédures, et surtout des suppressions de tournées donc davantage de travail pour les gens qui restent.
Souvent, ils font passer les choses en mettant des intérimaires ou des CDD sur des nouvelles tournées plus difficiles, comme ça ils ne disent rien, et puis une fois que les employés s’y sont habitués, ils espèrent basculer les CDI aussi sur ces tournées.
Donc tous les deux ans il y a des occasions de lutter mais c’est vrai que dans le bureau où je suis ça n’a rien donné. Le problème, c’est que ça s’enflamme assez facilement parce que c’est tendu, mais après ça ne tient pas. Surtout qu’en général, il y a beaucoup d’intox et de pression de la part de la direction. Et puis il y a de plus en plus d’emplois précaires, que ce soient des CDI intérim et des CDD.
Tu parlais des réorganisations, l’argument de la direction c’est…
C’est la baisse de trafic de courrier. De toutes façons le courrier, on sent bien que ça ne les intéresse plus.
Ce qu’ils veulent c’est virer le courrier, et faire des services… Ils testent tout. Aussi bien la « silver economy » avec les personnes âgées, que des prestations de service pour EDF, pour Orange, pour toutes les entreprises qui peuvent utiliser la Poste et son réseau. On est poussés à devenir des commerciaux.
Là, vous avez déjà la pression à la vente, au résultat, dans vos tournées ?
Oui, on nous met la pression. Depuis quelques années ils ont mis en place ce qu’ils appellent le « brief ». C’est-à-dire que tous les matins, un cadre nous fait le bilan des bons et des mauvais chiffres, des produits à pousser,… Sachant que normalement, on ne peut pas être noté sur des résultats financiers… Mais il y a du chantage. Tous les ans, on a un entretien avec une notation, qui peut avoir des répercussions en termes de mutation, et même financières. Et à chaque fois, dans cet entretien, on nous met des objectifs, même si on les chiffre pas, on va appuyer sur la vente… Si il n’y a pas de vente, notre note sera mauvaise. Ils n’ont pas le droit de faire ça.
En ce qui concerne les plus précaires, ils assistent aussi au brief. Mais je ne crois pas que la pression soit plus importante pour eux à ce sujet. Les chefs d’équipes n’arrivent pas à tout suivre et tout contrôler, ils n’en ont pas le temps. Je pense que tous les précaires, enfin dans le bureau où je bosse, s’en foutent un peu, et ils ont raison!
Du coup ça donne des bonnes pré-conditions pour lutter ! Pour lutter ou pas mais en tout cas pour foutre un peu la merde.
Disons que pour ce qui est des conflits, c’est vraiment inégal, ça va dépendre des bureaux. Par exemple à Paris, il y a un bureau qui a tenu un an de grève [1]. En fait il y a toujours un ou plusieurs conflits quelque part. Après, la Poste appelle les flics assez souvent, sans hésiter. Ils viennent sans problème, bien sûr. Sur des piquets, ou quand les grévistes essaient de rentrer dans les locaux.
J’ai l’impression que ça fonctionne mieux dans des petits bureaux, où ils sont 10-20, où je pense que l’unité est plus facile à créer.
Les petits bureaux ça va plutôt être en campagne. Mais c’est pour des revendications… Surtout qu’ils peuvent se faire aider, même des maires, des usagers… Donc l’unité et plus facile à créer et le soutien aussi
Sous l’angle du service public…
Voilà. C’est un peu ça le souci, c’est que ça reste toujours dans cette mentalité là. Avec tout ce que ça implique, que tu te fais avoir avec du chantage au service public.
En France ça fait maintenant trois semaines qu’un confinement a été décrété, tu peux nous expliquer comment s’est fait le passage au confinement dans ton bureau, ce qui a changé, et éventuellement les conflits larvés qui ont pu exister ?
Au début ils ont été à fond sur la communication, sur la sécurité, pour bien se dédouaner. Pour que ce soit notre faute, si jamais il arrive un accident ou quelque chose.
Quand il y a eu le confinement, ça a été massif, il y a eu des droits de retraits. Dans mon bureau, il y en a eu beaucoup le premier jour. Mais ça n’a pas duré ; le lendemain, beaucoup de gens sont revenus.
Il y a une boite d’intérim qui a laissé un peu ses employés tranquilles, c’est eux qui étaient majoritairement en droit de retrait. Elle leur a mis la pression au bout d’une semaine pour qu’ils retournent travailler, en leur parlant d’avocat etc.
A ce jour il y a toujours quelques absences, mais ce sont des parents qui doivent garder leurs enfants, ou des gens qui se sont mis en arrêt maladie.
S’il y avait encore ce droit de retrait par exemple, est-ce qu’il serait valable ? Dans le sens où, si la Poste a pris ses dispositions…
Alors on a un masque par jour, ce sont des masques chirurgicaux. Concernant le gel hydroalcoolique, on en a eu un peu au début, mais les flacons étaient périmés de 2016. Un médecin nous a dit qu’il restait quand même de l’alcool dedans…
Sur les masques, avant qu’il y en ait, le médecin du travail a expliqué que ça ne servait à rien. Elle est allée jusqu’à dire qu’il n’y avait pas de contamination inter-humains. Dans une PIC1 ils ont même dit que les masques pouvaient être dangereux, on risquait l’hyper-ventilation ! Ils sont calqués sur le gouvernement. Tant qu’il n’y a pas de matériel ils disent n’importe quoi. Il n’y a pas de gants. On nous a dit que pendant les tournées, on pouvait aller se laver les mains dans les bureaux qui étaient ouverts, chez les clients, dans les bureaux de tabac…
Tu peux nous dire ce qu’est la PIC ?
C’est un grand centre de tri. Plateforme industrielle du courrier. Donc c’est l’usine, et c’est ce qui alimente les bureaux de Poste du coin. Ce sont des équipes qui font plus un travail d’usine. Ils reçoivent le courrier et ils dispatchent sur la région. Eux, ils n’ont rien comme protection. Et pour garder les distances, c’est absolument impossible.
L’organisation du travail a changé ?
Il y a des bureaux qui, avec le rapport de force des facteurs, ont rapidement travaillé un jour sur deux, avec des horaires décalées, c’est-à-dire qu’il y en a qui commencent plus tôt, d’autres plus tard.
Ils avaient déjà fermé le samedi (c’était passé à 5 jours), la première semaine, car ça chauffait. Avec des discours du genre « on vous remercie pour votre dévouement ».
Et après le 30 mars, il y a finalement eu un truc national, parce qu’avec tous les droits de retrait, les arrêts, ça a fait beaucoup d’absences, ça a foutu la pression, y a quand même un rapport de force qui s’est créé. Que ça soit du retrait, des maladies ou des grévistes, ça faisait un tiers des effectifs absents.
Ils ont donc mis en place la distribution sur 3 jours. Et là, la presse, les maires, l’État, sont tombés sur la Poste. Il y a quand même obligation de distribution, six jours sur sept. Donc la semaine
prochaine, ils reviendraient là-dessus.
Nous on est au courant de rien. En tous cas, ils vont s’arranger pour qu’il y ait une distribution sur 5 jours au moins. Les postiers vont peut-être gueuler, et peut-être qu’ils changeront à nouveau…
Et il y a aussi une filière de la Poste qui ne fonctionnait plus.
Comment ça s’appelle ?
Médiapost. C’est de la publicité non adressée. Donc c’est des gens qui sont dans des conditions encore plus mauvaises que les postiers. Là ils étaient en chômage partiel. Ils ont prévu d’en rappeler 1200. Pour s’assurer principalement que la distribution de la presse se fasse aussi.
Sur certains bureaux ils parlent de volontariat des facteurs2. C’est bien possible qu’ils ne reconduisent pas les CDD, c’est arrivé à un de mes collègues.
Et qu’ils rappellent les mecs de Médiapost, qui ont une moins bonne convention (à qui on demande parfois de prendre leur propre bagnole…) et qui leur coûterait moins cher…
Et à Mediapost ils sont encore payés, enfin partiellement mais…
Oui ils sont quand même payés. Après quand il y a du volontariat demandé aux facteurs ça sera payé aussi. Je pense qu’il y a quand même pas beaucoup de boulot. Trois jours payés 100%, je pense que la direction n’apprécie pas.
Ils parlent aussi d’allonger les tournées, ça peut encore changer. De toute façon, ils naviguent à vue, c’est clair. Ils n’ont rien anticipé, ils sont très mauvais. Les bons trucs qui ont été posés pendant toute cette période, c’est les facteurs qui les ont imposés… Comme par exemple les horaires décalés, ça a été poussé par des facteurs, le traitement de lettres recommandées aussi, pour ne pas être en contact avec les gens à qui on doit les remettre. De toute façon tout a été arraché. Parce qu’ils n’ont rien prévu, et si tout le monde s’était tû, on aurait bossé sans protections, sans rien. Après il y a beaucoup de com’ sur notre protection, mais c’est faux. Il y a surtout beaucoup d’intox sur le droit de retrait, comme quoi on n’y aurait pas le droit à la Poste par exemple. Des trucs aberrants.
Est-ce que, même si vous êtes passés sous régime d’entreprise privée, vous êtes encore « réquisitionnables » ?
Il y a encore des fonctionnaires. Et malgré le changement de statut de l’entreprise La Poste a encore 4 missions [2]. La distribution du courrier 6 jour sur 7, c’est une obligation. L’État n’est plus majoritaire depuis le mois dernier [3] , un deal avec la Caisse des Dépôts, mais il reste des obligations de service public. Et il y a encore des fonctionnaires (un peu dans tous les métiers, mais il y en a de moins en moins) qui peuvent être réquisitionnés.
Le ministère du travail expliquait que si les dispositions étaient considérées comme prises par la boîte, le droit de retrait n’était pas justifié.
Et évidemment, la boîte dit qu’elle a tout mis en place…
Il y a une mentalité « service public » qui est bien ancrée. Il aurait dû être posé de fermer, de ne pas bosser. Parce que ce n’est pas vital. Là aussi, c’est selon les bureaux. Certains ont dit « la pub, on ne distribue pas », ils ont imposé le truc. Et il y a d’autres bureaux, comme le miens où malgré le confinement, on distribue de la pub.
Et du coup, toi, en ce moment, comment tu taffes ?
La première semaine j’étais en congés. Le lundi suivant, j’y suis allée en me disant que je notais tout les manques en protection. Le mardi, j’étais en droit de retrait. Le mercredi, personne ne bossait parce qu’ils mettaient des trucs en place. Le jeudi, je suis revenue pour constater que notre sécurité n’était toujours pas convenablement assurée. Et là, c’est pas directement lié au Covid, mais je suis en arrêt de travail.
Comment ça se passe pour vous donner les infos entre vous ? Est-ce que depuis le confinement et ces nouvelles dispositions, il y a un renouveau des discussions entre les gens qui travaillent à la Poste ? En tout cas autour des conditions de travail ? Ou c’est juste sur ton réseau ?
Avec les masques, les distances, c’est plus compliqué pour parler. Les collègues avec qui je discute c’est plus sur réseaux…
Il y a des gens qui ne sont pas bien. Surtout ceux en CDD. Ce sont des gens qui sont dans des situations précaires, qui sont coincés, qui réalisent bien qu’ils sont envoyés comme de la chair à canon… Mais ils se sentent coincés, par exemple, avec des CDD d’un mois, comment tu veux trouver un appartement ? Les proprios leur disent de revenir quand ils auront un CDI. Donc ceux-là, c’est comme ça, ils viennent bosser.
Des changement au niveau du salaire ?
Non, normalement on est sur du 100%, même si on travaille moins d’heures. Il y a des bureaux où quand les gens ont fini leur tournée ils peuvent rentrer chez eux. Ce qui est plus intelligent en ce moment. Mais il y a toujours des petits chefs qui obligent des personnes à rester ensemble dans une pièce jusqu’à ce que soit l’heure.
En plus, les femmes de ménages habituelles sont absentes, sûrement en arrêt. Donc la collègue qui vient en ce moment est nouvelle, elle vient d’une boîte privée, et elle est là en même temps que nous. Ça veut dire une personne de plus dans les locaux. Elle, elle galère plus pour bosser, et elle ne peut rien faire d’efficace concernant le nettoyage ou la désinfection.
Et pour toi, leur objectif c’est d’essayer de trouver la meilleure façon de reprendre le travail normalement ? Remettre les facteurs au travail ?
Leur idée c’est de nous mettre au travail, ça c’est clair.
Tu vois des perspectives de lutte ? Dans le temps présent ?
Pas dans mon bureau. Après, je sais qu’à la PIC il y a des grévistes. D’ailleurs il y a un collègue gréviste et syndiqué qui s’est carrément fait interdire de la PIC… Alors qu’il est censé travailler là-bas ! A partir du moment où il ne peut plus rentrer dans l’établissement, c’est une suspension. Normalement, pour une suspension, il y a une procédure. Ça ne se fait pas comme ça, du jour au lendemain.
Après il y a aussi les congés maladies, c’est aussi une façon derésister. Mais ça ne peut pas durer très longtemps, les médecins sont surveillés. Et tous les droits de retrait ont été considérés comme des absences irrégulières [AI].
Tu dis que les droits de retrait sont irréguliers. Est-ce que tu as eu des conséquences sur ta paie ?
Ben on va voir, parce que AI, normalement t’es pas payé. Ça va être compliqué de faire un truc global, dans la mesure où les droits de retraits s’appuient sur les conditions d’hygiène et que chaque bureau va être un cas particulier. Donc je pense que ça va se faire au cas par cas. Globalement, ils vont dire que tous les bureaux ne sont pas les mêmes, ce qui est vrai, et donc que les conditions de sécurité ne peuvent pas être uniformes.
Et la PIC, c’est un peu particulier parce que c’est plus du taf d’usine, tu as eu connaissance de la réorganisation, des changements ?
Eux aussi sont passés sur 3 jours. J’ai cru comprendre que c’était certainement parce que c’était compliqué de faire du un jour sur deux en PIC.
Comme c’est du taf sur machines, c’est compliqué de supprimer des postes. Donc pas de division d’équipe, je crois. Les absences fluctuent, mais ils étaient à peu près un tiers à être absents d’une manière ou d’une autre. Et il y a des grévistes à la PIC. Mais bon, de toute façon, on les met à la porte.
A la PIC, ils tiennent des AG. On a commencé à leur dire que c’était plus possible de les tenir dedans, qu’il fallait aller dehors.
Et quand ce confinement va se terminer, tu penses que les gens seront remontés contre la direction de la Poste ? Qu’ils engageraient des luttes ?
Je suis assez pessimiste de ce côté là sur mon bureau. Si effectivement ils ne paient pas les droits de retrait, il y aura une réaction là-dessus. Après les luttes à la Poste, les syndicats sont vachement là, surtout la CGT, donc c’est pas terrible.
Mais je ne crois pas trop au conflit tardif. En fait, ceux qui réagissent le plus sont les CDD qui ont moins de marge de manœuvre
Est-ce que tu as eu vent de collègues qui auraient été infectés par le Covid ?
Ils ne veulent passer aucune info là dessus alors ils opposent le droit à la confidentialité…
Et après, la manière dont ça se passe quand il y a un cas, c’est très aléatoire. C’est étouffé, ils ferment le bureau un jour, ils disent qu’ils désinfectent et puis c’est tout. Sinon, ils disent aux gens que si ils veulent partir ils peuvent.
Les chefs ont quand même une marge, donc ça peut aussi réagir en fonction des personnes et c’est toujours pareil, de la pression des facteurs. C’est toujours le rapport de force qui va faire bouger.
Est ce qu’il y a d’autres services suspendus ?
Par exemple, nous, les lettres recommandées, ça a été fait, on n’y va plus. Le client s’identifie par internet et le recommandé lui est remis en boîte.
Et après il y a des trucs, c’est du bricolage. A un moment, les paquets avec signature, on avait pour consigne de contacter la personne, pour lui demander si elle était ok pour qu’on signe à sa place. Ce qui est totalement illégal. Il y a quand même eu des facteurs qui se sont fait virer pour ce genre de trucs avant !
Donc moi, j’ai demandé si on pouvait avoir une note écrite. On m’a répondu de faire confiance à ma direction ! Là, j’ai quand même répliqué que justement je n’avais aucune confiance. Ça s’est terminé par « tu fais ce que tu veux »…
Et est-ce que tu as des nouvelles des filiales, des sous-traitances, ou des plateformes uberisées ?
Pas vraiment, mais pas besoin du Covid pour taffer dans des conditions de merde. Sur la distribution des colis ou la sous-traitance, les heures ne sont pas payées, il y a des types qui dorment dans leurs propres bagnoles, sans contrat, c’est l’horreur…
Pour terminer sur la Poste, est-ce que déjà aujourd’hui, tu vois des dispositifs que pourrait mettre en place la Poste maintenant, qui leur serviraient plus tard pour continuer à dégrader vos conditions de travail ?
Là comme ça je ne vois pas vraiment. De toute façon, il ne va pas y avoir de télétravail. Au fond, ils n’ont pas changé grand-chose pendant le confinement. De toute façon, ils ont les réorganisations tous les deux ans pour faire ça. Pour mettre en place ce qu’ils mettent en place actuellement, comme la distribution en îlots par exemple, qui nous atomise encore davantage… C’est à dire qu’ils délocalisent une partie des tournées sur des locaux moins chers. Donc les facteurs qui bossent là ne voient plus leurs collègues. Mais surtout les tournées sont déjà “livrées” triées et classées par des machines. Donc l’intégralité du travail se fait dehors. Quand il fait chaud ou froid, c’est pas cool. Mais surtout le tri machine c’est la cata. Quand tu tries ta tournée, tu fais un premier travail de mémorisation, ça t’aide pour la distribution. Ensuite, il y a moins de ressources que dans un vrai bureau en cas de problème matériel ou administratif. En fait ça leur permet de rallonger les tournées, de diminuer le nombre d’agents,et de récupérer de la thune sur l’immobilier.
La crise sanitaire, je ne vois pas ce qu’elle leur amène de ce côté-là. Même le flicage, étant donné qu’on a un logiciel intégré au smartphone, c’est déjà en place…
[1] www.leparisien.fr/hauts-de-seine-92/les…
[2] service universel postal, contribution à l’aménagement du territoire, accessibilité bancaire et transport et distribution de la presse
[3] 16 mars, la part de l’État est passé de 73,68% à 34%
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