AUX TRAVAILLEURS ALGÉRIENS

Bravo ! tu commences à te réveiller, tu entres dans la lutte sociale après avoir compris que tu es trop opprimé. Mais, hélas ! croyant te libérer de la peste française qui te ronge, tu veux te rejeter vers le choléra islamique qui te détruira pareillement ou vers la politique qui te dévorera.

Que veulent de toi les charlatans qui t’entourent ?

Tous ont un même but : républicains ou communistes, royalistes ou fanatiques des diverses religions, tous cherchent à vivre de la sueur de ton front et à te tenir dans l’esclavage le plus éhonté et le plus misérable.

Ils te prêchent chacun à leur manière mais leurs méthodes sont les mêmes : te tenir sous leur autorité pour te gouverner et t’exploiter sans vergogne.

Anarchistes, nous te disons : « A bas tous les gouvernements et tous les exploiteurs qu’ils soient roumis ou musulmans, car tous veulent vivre sur le dos des travailleurs. Qu’ils s’appellent Daudet ou Herriot, Blum ou Cachin, la Roque ou Sidi Abdalah, tous sont des politiciens qui cherchent leurs intérêts et non le tien ».

Les pauvres n’ont ni Dieu ni Maître, ni Patrie et tu es parmi ceux qui sont le plus frappés par la vindicte capitaliste, religieuse ou politicienne qui rançonne votre crédulité ; ne craignez pas les brimades des gouvernants cyniques de la IIIe République. Le droit à la lutte ne se donne jamais, mais il se prend. Brisez ces lourdes chaînes qui vous retiennent dans l’esclavage, refusez votre confiance aux gouvernants qui, après avoir volé votre terre natale, vous traquent en France pendant qu’ils ouvrent les bras aux fascistes d’Italie et d’ailleurs.

Et si l’on veut vous entraîner dans des aventures guerrières, souvenez-vous des cent mille des vôtres qui furent assassinés sur les champs de bataille pour défendre de prétendus droits que l’on vous refuse maintenant.

Ne craignez ni violence, ni prison, luttez sans relâche contre tous les régimes autoritaires, car ils sont toujours basés sur l’exploitation de l’homme par l’homme.

A bas tous les esclavagistes, quels qu’ils soient !

A bas tous les dictateurs ! A bas toutes les patries !

Ni Dieu, ni Maître ! Vive l’Anarchie !

MOHAMED SAÏL
Pour le Groupe Anarchiste des Indigènes Algériens

[La Voix Libertaire N° 287 – Samedi 19 janvier 1935]