Argentine : zanon de nouveau menacée
Catégorie : Global
Thèmes : Archives
Le 12 août 2004, une brutale opération policière, ordonnée par un juge comercial, a expulsé 100 ouvriers de l’entreprise Gatic dans la localité de Pigüé, au sud de la province de Buenos Aires. Les installations de Gatic, une entreprise qui fut déclarée en faillite de manière frauduleuse par l’entrepreneur Bakchelián, étaient occupées depuis plusieurs mois par ses travailleurs, qui luttent pour la récupération sous autogestion de l’entreprise, avec le soutien du Mouvement Nacional des Entreprises Récupérées (MNER) et la communauté de Pigüé (y compris de son intendant et conseillers). Les policiers en charge de l’expulsion sont venus d’autres zones de la province et sont entrés dans la fabrique en utilisant des gaz et des balles de gomme, lors d’une opération qui fut planifiée avant la rédaction de l’ordre d’expulsion.
Pour sa part, Zanon, la fabrique de céramique récupérée en 2001 et le symbole du mouvement, tant par sa durée que par son succès (400 ouvriers, augmentation de la production, intégration de 130 chômeurs, salaires largement supérieurs à la moyenne…) se trouve sous la menace d’une future expulsion. Le juge en charge du concours de créanciers de Zanon a fixé la date de clôture du processus, sans reconnaître la coopérative formée par les travailleurs.
Ceci ouvre la possibilité que le « propriétatre » Zanon, les banques ou les capitaux étrangers tentent d’en finir avec la gestion ouvrière. S’y ajoute également le fait que le gouvernement de Neuquén s’est présenté pour la première fois dans le concours de créanciers, en déclarant que les ouvriers de Zanon doivent rendre la fabrique à ses « légitimes propriétaires », et qu’il allait leur financer un projet productif (ce genre de projet étant habituellement réservé aux chômeurs, les ouvriers de Zanon ont répondu que eux avaient déjà un travail mais qu’ils étaient prêts à s’y impliquer au bénéfice des innombrables chômeurs de la région).
Les ouvriers ont discuté et établit un plan de lutte, qui a débuté par une manifestation de 5000 personnes dans les rues de Neuquén.
Après la mobilisation et une rencontre à Neuquén pour discuter des suites à donner au niveau provincial, les travailleurs de Zanon ont convoqué une réunion à Buenos Aires à l’hotel récupéré Bauen à laquelle ont participé des dizaines d’organisations piqueteras, syndicales, de défense des droits de l’homme de tout le pays. La défense de la gestion ouvrière, la reconnaissance de la part du juge et des autorités de la coopérative, l’expropriation de Zanon et l’approbation d’une loi nationale d’expropriation définitive de toutes les entreprises récupérées par les travailleurs, le soutien aux travailleurs de Gatic et la reconnaissance de leur coopérative dans toutes les fabriques de la marque ont été exigés.
Il a été convoqué pour le 10 septembre 2004 à une mobilisation à Buenos Aires pour réclamer au juge la reconnaissance de la coopérative des travailleurs de Zanon et une loi nationale d’expropriation définitive pour toutes les entreprises récupérées ou en procesus de récupération au Parlement Nacional.
Depuis 3 ans, cinq expulsions de la fabrique ont été prévues, à chaque fois la détermination des ouvriers (« nous nous battrons jusqu’aux dernières conséquences ») et le soutien de la population de Neuquén les ont mis en échec. Ce n’est pas un hasar si le propriétaire Zanon est un grand ami de l’ex président Carlos Menem et que le gouverneur de la province de Neuquén, Sobitch, soit ménémiste. On peut estimer cette offensive comme celle de la mafia économico-politique argentine dont l’objectif est d’en finir avec la mauvaise habitude des travailleurs argentins de se croire les maîtres des entreprises dans lesquelles ils travaillent. Une tentative réelle d’expulsion de Zanon serait sans nul doute mortifère et si elle était menée à bien ouvrirait la porte à une expulsion de toutes les entreprises récupérées.
Commentaires
Les commentaires sont modérés a priori.Laisser un commentaire