Juge : Constance DESMORAT
Assesseures : Muriel BLANCHARD et Marie Caroline MATHIEU DE BOISSAC
Procureur : Thierry ROLLAND
Avocate des flics : Annie HUPÉ

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M. est accusé de :
– Participation avec arme à un attroupement par une personne dissimulant volontairement son visage afin de ne pas être identifiée
– Outrage à une personne dépositaire de l’autorité publique
– Violence sur une personne dépositaire de l’autorité publique sans incapacité lors de manifestation sur la voie publique

2 motards de la gendarmerie sont partie civile (dont 1 qui l’était aussi lors d’une compa liée à la dernière manif).

M. accepte la comparution immédiate.

La juge, comme à son habitude, lit un déroulé de la manif écrit par les flics puis questionne M. sur les faits. Il reconnaît avoir jeté des pierres sur les flics, mais pas les outrages ni la dissimulation de son visage pour ne pas être identifié.

Comme d’habitude aussi, la juge se fout de la gueule de l’accusé :
« Vous étiez masqué, pourquoi ?
– À cause des gaz lacrymo et des journalistes, pour ne pas être reconnu
– Pour ne pas être reconnu par la police ?
– La preuve que non puisqu’ils m’ont reconnu
– Ah ça Monsieur, ça veut juste dire qu’ils sont plus malins que vous !
 »

Elle lui reproche aussi de ne pas avoir la même version que celle inscrite dans le PV des flics :
« Vous avez une façon de raconter VOTRE manifestation, c’est à dire pas le récit objectif que j’ai fait tout à l’heure » ou encore « L’enchaînement logique que vous présentez ne correspond pas du tout au déroulé de la manif ! ».

Que cela soit au moment d’établir si les faits qui sont reprochés à M. sont caractérisés ou lors de ce que la justice appelle « l’examen de la personnalité du prévenu », tout ce qui est dit est à charge.

L’avocate des flics fait son discours habituel, elle répète les mêmes arguments que lors des comparutions de vendredi où des motards de la gendarmerie étaient partie civile. Parmi les perles qu’elle sort ce jour-là, une fait particulièrement rire les quelques personnes venue en soutien dans la salle : «  Les fonctionnaires défendent, j’ai envie de dire, le pavé nantais ! ». Elle demande que M. soit condamné au pénal, mais aussi sur le plan civil (dommages et intérêts au titre du préjudice moral).

Voilà maintenant le tour du procureur.
Comme la veille, il s’emporte et théâtralise son réquisitoire. Il crie, gesticule et se montre menaçant à l’égard des prévenus. Il outrepasse à plusieurs reprises ses fonctions, notamment lorsqu’il dit à M. :
« Vous travaillez dans une boutique ? J’aimerai savoir ce que ça vous ferait si on venait la caillasser. Ça serait sympa d’aller caillasser votre boutique. Ah oui, ça serait sympa, vous verriez ce que ça fait. Et puis peut-être que vous perdriez votre boulot ! ». Il lui dit aussi que son projet d’aller travailler dans un autre pays n’est pas prêt de se réaliser parce qu’avec la condamnation qu’il va avoir il n’obtiendra pas de visa. En criant : « Vous pouvez oubliez vos projets ! »
Il requiert 6 mois d’emprisonnement dont 5 avec sursis et demande le mandat de dépôt.

L’avocate, commise d’office, fait remarquer que le réquisitoire du proc est sévère. Elle n’enfonce pas M. mais joue à plusieurs reprises sur la division casseur.euses/manifestant.es. Elle n’hésite pas ensuite à reprendre la juge qui avait reproché à M., à propos des outrages, de sous-entendre
que les flics mentaient. Elle se dit ensuite particulièrement choquée par le fait que l’avocate des flics ait pu dire « Si vous ne supportez pas les gaz, vous ne venez pas en manifestation ! » alors que les manifestations à Nantes en ce moment se font systématiquement gazer par la police. Enfin, elle critique la politique du parquet qui consiste à passer des personnes en comparution immédiates pour faire des exemples en pensant que ça va calmer les manifestant.es et insiste sur le fait que cela ne fonctionne pas.
Elle demande un peine de TIG (M. n’a pas de casier judiciaire) et insiste sur le fait que demander 400€ pour chaque flic alors que M. ne gagne que 600€ par mois est disproportionné.

Décision du tribunal : 140 heures de TIG à effectuer dans les 18 mois qui seront transformés en 6 mois de prison ferme s’ils ne sont pas effectués + interdiction de porter des armes pendant un an + obligation d’indemniser les victimes. 200€ de dommages et intérêts ont étés accordés à chaque flic (=400€)

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F. est accusé de :
– Participation avec arme à un attroupement (arme = 3 cailloux)
– Outrage à une personne dépositaire de l’autorité publique (doigts d’honneur)
– Violence sur une personne dépositaire de l’autorité publique sans incapacité lors de manifestation sur la voie publique (jet de caillou)

3 parties civiles (des BACeux)

Lorsque la juge lui demande s’il accepte la compa ou s’il préfère obtenir un délais, il dit préférer obtenir un délais. Elle commence à expliquer que le tribunal doit alors statuer sur son maintien en détention ou sa remise en liberté avec éventuellement un contrôle judiciaire en attendant le procès. L’avocat de F., Fabrice Petit, intervient alors pour dire que « [son] client » n’a pas compris la question et la juge se met à engueuler F. pour ne pas avoir compris la question…

Hormis les PV des flics qui se contredisent et des photos de pierres, le dossier est vide. F. reconnaît avoir jeté 1 caillou et conteste les outrages. Les 4 témoins auditionnés sont des flics : 3 sont parties civiles pour cette affaire et le 4ème n’est autre qu’un des motards qui était partie civile pour la compa précédente. Sans surprise, la juge se fout de la gueule de F. dès qu’elle en a la possibilité et ne retient que les éléments à charge contre lui. Elle évacue tout élément qui pourrait être à décharge et aide les flics à rendre leurs versions cohérentes. Deux flics parties civiles témoignent à la barre. L’un n’aura le droit qu’à une question (pour rendre cohérent son témoignage) et le second demandera à intervenir pour faire son propre récit de la manif. À nouveau interrogé par la juge, F. maintient sa version et se fait à nouveau engueuler.

L’avocate des flics fait son speech habituel sur les BACeux qui ont peur pour leur vie, qui sont envoyés en première ligne avec pour seule protection leur casque et qui, à chaque manifestation se demandent s’ils vont en ressortir indemne. Elle demande là aussi des dommages et intérêts au titre du préjudice moral.

Le procureur s’énerve à nouveau. Il se plaint d’avoir l’impression qu’il est reproché au parquet des atteintes au droit de manifester et dit que les personnes qui sont déférées en comparution immédiate sont des casseurs. Il hurle : « Ils sont dans un monde virtuel. Ils viennent casser du flic et des abris bus. Hier c’était pitoyable, l’arrêt de tram médiathèque cassé, c’est pitoyable !!! Il va falloir le répéter combien de fois devant ce tribunal ? Combien de fois ? CASSER, ILS VIENNENT CASSER !!! ». Plus tard : « Si la justice ne passe pas en disant « STOP on arrête », moi je ne garantie plus rien en terme d’ordre publique. Le 3 mai, il n’y avait plus de gardes mobiles à Nantes et toute la CRS était à Rennes. Tous les fonctionnaires du commissariat on été obligés de descendre ! Si vous voulez la ville à feu et à sang continuez comme ça ! ». Il dit à F. que les personnes qui pratiquent la profession qu’il a choisi (pour laquelle il est en formation) sont des escrocs et qu’ils pourraient bien aussi se faire casser leurs vitrines. Pendant ce réquisitoire, même la juge semble avoir honte de ce que dit le proc..

L’avocat de M., Fabrice Petit (commis d’office), reprend ses arguments de la veille sur les mouvements sociaux et dit que le procureur essaie de faire croire que les affrontements avec les flics sont nouveau à Nantes alors que ce n’est pas le cas. Il cite l’exemple d’une manif à laquelle il a participé en 1979, où il y avait eu ce affrontements et lors de laquelle il y avait eu 80 interpellations dont de futurs magistrats. Il reproche au tribunal de vouloir que les manifs ressemblent à certaines manifs américaines où les salarié.es tournent autour de leur entreprise avec des pancartes et rappelle que l’histoire des mouvements sociaux en France ce n’est pas ça. Il s’énerve sur la distinction manifestant.e.s/pas manifestant.es qui revient à chaque audience puis revient sur la question de la non déclaration des manifs en expliquant que même les syndicats ne déclarent pas les manifs à Nantes, que c’est issu des grandes grèves des chantiers. Il se fout ensuite de la gueule du proc qui voudrait qu’à 14h30 tout le monde soit rentré chez soi et la manif terminée : « Une journée de grève, c’est toute la journée ! ». Il parle ensuite des interdictions de circulation dans le centre ville les jours de manifs délivrées à certaines personnes par la préfecture et de la manif interdite.

Il parle ensuite de F., qui est lycéen, n’a pas de casier et va passer son bac. Il trouve que c’est facile de le condamner alors que lors de certains mouvements il n’y a pas de condamnations (évoque sans nommer le syndicat les agriculteurs de la FNSEA, les marins pêcheurs…).
Il ne dit pas quelle peine pourrait être plus adaptée et ne demande pas de revoir à la baisse les demandes de dommages et intérêts…

Décision du tribunal : 140 heures de TIG à effectuer dans les 18 mois qui seront transformés en 6 mois de prison ferme s’ils ne sont pas effectués  + obligation de trouver un travail ou une formation + interdiction de porter des armes pendant un an + obligation d’indemniser les victimes. 500€ de dommages et intérêts ont étés accordés à chaque flic (=1500€)

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Bilan des interpellation pour la manif du 17 mai :
– 16 interpellations
– 14 GAV
– 4 comparutions immédiates (à confirmer)

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Bilan au 27 mai des interpellations à Nantes depuis le début du mouvement :
– 10 mars : 5
– 17 mars : 3
– 24 mars : 19
– 31 mars : 16
– 5 avril : 15
– 9 avril : 6
– 14 avril : 18
– 20 avril : 7
– 28 avril : 41
– 6 mai : 14
– 10/11 mai : 5 (à confirmer)
– 12 mai : 21
– 17 mai : 16
– 19 mai : 97
– 26 mai : 8
– 8 personnes arrêtées hors contexte de manif à qui la justice reproche des infractions liées aux manif (violences, Go Sport, voiture brûlée)

On arriverait donc à 299 interpellations depuis le début du mouvement.