A bas l’intervention militaire française au mali !
Catégorie : Global
Thèmes : Guerre
Ne voulant pas apparaître au premier plan et pour éviter le risque d’un enlisement sur le terrain, le gouvernement Hollande a essayé de mettre sur pied une force militaire africaine, qu’il aurait dirigé et dont il aurait seulement assuré la logistique, afin de suppléer à la faiblesse de l’armée malienne .
Sur le plan intérieur malien, le gouvernement français n’a reculé devant aucune pression pour obtenir du président intérimaire Dioncouda Traoré (qui, blessé par des manifestants et soigné à Paris, n’était pas très chaud pour rentrer à Bamako) une demande d’aide officielle ; celui-ci ne pouvait d’autant moins résister aux demandes françaises qu’il était confronté à des manifestations journalières demandant son départ. Dès le début de l’intervention militaire française, l’état d’urgence a été décrété rendant les manifestations interdites, tandis que les militaires se livraient à Bamako à des exactions et des opérations nocturnes d’intimidation contre les habitants venus du Nord.
Sur le plan diplomatique, une intervention militaire française rencontrait l’hostilité plus ou moins avouée de l’Algérie et des Etats-Unis, ainsi que d’autres pays européens. L’envoyé spécial de l’ONU, l’ancien premier ministre italien Prodi (l’Italie a des intérêts au Mali), se disait partisan de négociations et excluait toute action militaire avant un an. Le gouvernement Algérien était opposé à des opérations militaires, par crainte de voir son territoire touché par des combats, la frontière entre le Mali et l’Algérie n’étant pas facilement contrôlable ; les Américains qui ont formé une partie des militaires maliens y compris des Touaregs qui se sont ensuite joints à la rébellion (1), avaient publiquement affirmé qu’une solution politique était souhaitable et que le plan français d’intervention militaire ne valait rien . En réalité ils n’avaient aucun désir de voler au secours d’un régime pro-français à Bamako : les déclarations d’unanimité et de solidarité dans la « lutte contre le terrorisme » – comprendre : lutte contre tout ce qui menace de perturber l’ordre capitaliste international – ne peuvent cacher les sordides rivalités inter-impérialistes !
Les vautours impérialistes français défendent leur « pré carré » africain ( selon l’expression de l’ancien président socialiste Mitterrand pour désigner les anciennes colonies, devenues indépendantes mais restées dominées par la France) depuis des décennies y compris par des guerres et des interventions militaires, parce qu’il est la source de juteux profits pour les grandes et moins grandes sociétés néo-coloniales . Mais l’inexorable poussée économique mais aussi politique des impérialismes concurrents menace de plus en plus les positions de l’impérialisme français, le contraignant à recourir à la force pour se maintenir .
Finalement, la décision française « unilatérale » de déclencher l’intervention militaire a reçu le soutien verbal de toutes les puissances impérialistes, Américains, Russes et Chinois compris et des Etats de la région. L’Algérie, bon gré, mal gré, a accepté d’ouvrir son espace aérien aux bombardiers français et de fermer sa frontière aux rebelles maliens, tandis que les Etats africains de la CEDEAO ont commencé à envoyer au Mali les forces militaires promises.
Mais il n’est pas sûr que l’intervention militaire impérialiste en cours sera une promenade de santé ; lle gouvernement affirme qu’elle durera « le temps qu’il faudra » tandis que le nombre de soldats et les moyens mobilisés ne cessent de s’accroître au fil des jours : on parle maintenant de plus de 3000 soldats français, venus tant de la Côte d’Ivoire ou d’autres pays africains où ils sont stationnés, que de la métropole et les « spécialistes » militaires disent que la guerre sera longue…
Le Mali, grand comme plus de deux fois la France mais peuplé de seulement 15 millions d’habitants, est un pays essentiellement agricole (plus de 70% de sa population vit à la campagne). Ancienne colonie française, il englobe à l’intérieur de ses frontières des populations diverses par la langue, les coutumes ou l’histoire que la débilité du développement économique et social n’a pas réussi à unifier, comme en témoignent les insurrections récurrentes des populations Touaregs du nord. La crise économique internationale, qui a eu des effets déstabilisateurs dans les pays de la région (voir le cas de la Côte d’Ivoire voisine) a inévitablement aggravé les contradictions internes du Mali, où derrière, la façade du « modèle démocratique malien » la classe dirigeante affairiste est associée à l’impérialisme pour piller les ressources du pays sans se soucier du sort de la population ; des grèves ont eu lieu dans différentes entreprises, y compris les mines d’or, tandis que le chômage et la hausse des prix aggravaient le mécontentement parmi la population.
En mars de l’année dernière, à quelques semaines des élections, à la suite d’une mutinerie de soldats après la défaite militaire face aux rebelles, une junte militaire renversait le président Amadou Toumani Touré, soupçonné de vouloir négocier avec les indépendantistes Touaregs, et prenait le pouvoir. Mais sous la pression des Etats africains et de l’impérialisme français, la junte était contrainte de céder la place à un « gouvernement de transition » ; cependant, imposé par l’étranger, ce gouvernement ne jouit d’aucune légitimité aux yeux de la population, plus sensible aux déclarations des anciens putschistes contre la corruption des politiciens. Entre-temps le nord du pays est passé sous le contrôle des rebelles Touaregs, puis d’organisations islamistes qui s’étaient fournies en armes en Libye : la chute du régime de Kadhafi sous les bombardements de l’OTAN a eu l’effet inattendu de faire disparaître un des piliers de l’ordre impérialiste dans la région…
Une soixantaine d’entreprises françaises sont présentes au Mali. Lors de la libéralisation des années 90, les grandes sociétés d’Etat (Banques, Télecoms, Textile, etc.)ont été privatisées au profit notamment de grandes entreprises comme Bouygues, Vinci, Vivendi, etc.
Avant les exportations traditionnelles de coton et de bétail, la principale exportation malienne est, depuis quelques années, l’or (70% des recettes d’exportation) dont les mines, très rentables, sont la propriété des grandes sociétés britannique, sud-africaine associées à l’Etat malien et dont une filiale de Bouygues assure la production (2). Le manque de capitaux a empêché jusqu’ici l’exploitation des autres richesses présentes au Mali ; le Nord semi-désertique recèle probablement des gisements de pétrole (le géant pétrolier italien ENI, l’algérienne Sonatrach ainsi que d’autres sociétés moins importantes prospectent la région) et d’uranium.
Cependant l’importance du Mali pour les capitalistes français tient davantage à la position stratégique de ce pays : en s’opposant aux rebelles maliens, les soldats français protégent les gisements d’uranium exploités par Areva au Niger voisin (Areva y a déjà eu maille à partir avec des Touaregs). Mais plus généralement il s’agit pour l’impérialisme tricolore de sauvegarder, face à ses concurrents comme face aux révoltes des populations, sa position dominante dans la région : « Au Mali, la France joue aussi l’avenir de sa présence en Afrique » explique ainsi à ses lecteurs l’éditorialiste du quotidien patronal « Les Echos » (3).
Mais ce n’est pas qu’au Mali que l’impérialisme français est entré ces dernières semaines en action. Le jour même où des avions français commençaient à attaquer les rebelles maliens, une importante opération militaire était déclenchée en Somalie pour essayer de récupérer un agent des services secrets prisonnier des islamistes locaux ; les militaires françaises ne se sont pas souciés d’avertir le gouvernement somalien de leur action sur son territoire : le gouvernement Hollande qui se gargarise du respect de la « légalité internationale » à propos du Mali a démontré ainsi, une nouvelle fois, que celle-ci n’était qu’un chiffon de papier que les gangsters impérialistes n’invoquent que lorsque cela les arrange…
En République Centrafricaine, le gouvernement Hollande avait juré haut et fort qu’il n’était pas question d’envoyer des soldats français pour sauver le régime qui, face à une rébellion soudaine, demandait l’aide de Paris (en réalité il y avait déjà une présence militaire française depuis 2002 dans la cadre de l’opération « Boali » de « consolidation de la paix » !). Arrivé au pouvoir par un coup d’Etat militaire entériné (ou provoqué ?) par Paris, Bozizé avait fini par lasser les impérialistes qui traitaient son régime d’ « autiste » parce qu’il refusait de suivre leurs « conseils ». Fin décembre, des centaines de soldats français (ils seraient aujourd’hui près de 600) étaient donc malgré les déclarations de Hollande envoyés dans la capitale Bangui : mais c’était seulement, paraît-il, pour « protéger » les ressortissants français ! En réalité, avec les militaires tchadiens déjà présents dans le pays, ces soldats avaient pour mission de dissuader une poussée des rebelles vers Bangui, tout en faisant pression sur le régime. Le « message » des impérialistes français est passé, semble-t-il : Bozizé a accepté la formation d’un gouvernement acceptable par l’opposition ainsi que son départ programmé du pouvoir. C’est de cette façon que le gouvernement PS-Verts conçoit la non-ingérence dans les affaires intérieures des pays africains…
Les interventions militaires et les guerres que mène depuis des décennies l’impérialisme français en Afrique (les dernières en date étant en Libye et en Côte d’Ivoire), ne sont en rien motivées par des soucis « humanitaires » ou « démocratiques » comme le prétend la propagande officielle ; elles sont exclusivement causées par le souci de défendre les intérêts des entreprises qui continuent à mettre en coupe réglée ses anciennes colonies et à accroître leurs affaires ailleurs.
Si en dépit des contraintes économiques qui l’obligent à tailler dans ses dépenses, et même à « redimensionner » son appareil militaire, l’impérialisme français fait l’effort de maintenir un réseau de bases militaires qui quadrille une partie de l’Afrique , c’est bien parce qu’il retire des avantages sonnants et trébuchants de son rôle de gendarme de la région !
L’impérialisme français représente ainsi une menace directe envers toutes les éventuelles luttes d’émancipation des prolétaires et des populations opprimées et exploitées de ces pays, et plus généralement une menace envers le sort des populations civiles qui font toujours les frais des affrontements entres forces et Etats bourgeois.
Mais les bourgeois et leurs hommes de paille politiques vont aussi faire payer les frais de leur guerre aux prolétaires de France ; d’abord en aggravant plus particulièrement la pression policière envers les travailleurs immigrés issus de ces régions (le plan « Vigipirate » a été renforcé et, selon la presse, les services policiers cherchent à accroître la surveillance des prolétaires d’origine malienne en France, au nombre de plusieurs dizaines de milliers), et en aggravant l’exploitation capitaliste.
Si au moment où était déclenchée la guerre du Mali, un accord « historique » était signé entre le patronat et les syndicats les plus collaborationnistes pour plier davantage les travailleurs aux exigences capitalistes, et Renault annonçait la suppression de milliers d’emplois, cela relève évidemment du hasard du calendrier.
Mais au fond la guerre impérialiste à l’extérieur et la guerre sociale à l’intérieur, ne sont que les deux aspects d’une même attaque du capitalisme pour restaurer ses taux de profit en accroissant l’exploitation, la misère et l’oppression. Et ce n’est pas un hasard si cette attaque capitaliste, qui rencontre l’approbation unanime de tous les partis politiques, du PCF au Front National, est menée par un gouvernement de gauche : jamais un gouvernement de droite n’aurait pu asséner de tels coups sans susciter de réactions ! Comme toujours, les larbins réformistes de la bourgeoisie ~ les grands appareils politiques et syndicaux (et leurs suivistes d’extrême gauche) – sont les seuls capables de paralyser la classe ouvrière quand elle est frappée par la classe ennemie.
Le déclenchement de la guerre au Mali, qui a provoqué par contrecoup la sanglante attaque contre le gisement gazier d’In Amenas en Algérie, doit être compris par les prolétaires comme l’illustration de ce que leur réserve le capitalisme en crise : non pas un avenir d’amélioration graduelle de leurs conditions après un moment difficile, mais un avenir de sang et de larmes, auquel il n’est possible d’échapper que par la lutte. Parce qu’ il vit de leur exploitation, les prolétaires des métropoles impérialistes ont la possibilité de mettre fin au système capitaliste qui ensanglante la planète ; il leur faut pour cela combattre sans hésiter toutes les attaques bourgeoises, dans la perspective de renouer avec la lutte de classe révolutionnaire qui leur a déjà permis dans le passé de se lancer à l’assaut du capitalisme : les prolétaires n’ont à perdre que leurs chaînes, ils ont un monde à gagner !
A bas l’intervention impérialiste au Mali !
Non à l’union sacrée en soutien à la guerre impérialiste !
A bas l’impérialisme français !
Vive l’union internationale des prolétaires !
Vive la reprise de la lutte de classe contre le capitalisme mondial!
Parti Communiste International
(1) Voir l’enquête du New York Times du 14/1/13 qui détaille les dépenses américaines pour former les militaires au Mali, dans le cadre de la politique anti-terroriste US en Afrique. Selon le quotidien 1600 militaires formés par les Américains (sur les 8000 que compte l’armée malienne) auraient rejoint avec armes et bagages la rébellion ! «la rébellion islamiste utilise les soldats et les officiers formés par les américains qui ont fait défection de l’armée régulière du Mali l’an dernier, en emportant avec eux leur formation de la lutte contre le terrorisme, leurs compétences de combat avancés, ainsi que leur connaissance des méthodes de renseignement occidentaux. La France est maintenant à affronter un ennemi islamiste que les Etats-Unis ont involontairement aidé», écrit le NYT qui relève aussi la réticence des autorités américaines à aider les Français. Cf http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/au-mali-le…29111
(2) Les mines d’or maliennes sont particulièrement rentables. Selon un rapport de la FIDH (Fédération Internationale des Droits Humains) de septembre 2007, en 2005 la production d’une once d’or y avait un coût de 95 dollars alors qu’elle était vendue 245 sur le marché. Le cours de l’once d’or est aujourd’hui supérieur à 1600 dollars, alors que le coût de la production n’a pratiquement pas augmenté. Rien d’étonnant si la sudafricaine Randgold a annoncé l’année dernière des profits records pour sa mine malienne de Morila ! Randgold et Anglogold sous-traitent la production à une filiale de Bouygues, Somadex. En 2005, la Somadex avait licencié 530 ouvriers pour avoir fait grève. Cf http://www.peuples-solidaires.org/293-mali-sombres-mine…99or/
(3) Cf Les Echos, 18-19/1/13
« Mesdames et Messieurs, le Mali fait face à une agression d’éléments terroristes,venant du Nord, dont le monde entier sait désormais la brutalité et le fanatisme ». C’est ainsi que François Hollande présentait le 11 janvier la mise en route de la machine de guerre tricolore. Les socialistes et les écolos n’en sont pas à leur première expérience. Sans remonter trop en arrière, on songera au Kosovo en 1999 et à l’Afghanistan, sous le gouvernement de la Gauche Plurielle PS-PC-Verts de Jospin.
Cette fois c’est dans le Nord du Mali que les socialistes interviennent, une vaste région, grande comme la France, contrôlée notamment par des groupes armés islamistes depuis plusieurs mois. L’enjeu est de défendre la stabilité du pré-carré néocolonial français en Afrique de l’Ouest ainsi que les intérêts des multinationales françaises, comme Areva, qui ont mis la région sous coupe réglée depuis décennies. Le tout est accompagné de formules aussi ronflantes que mensongères sur « la défense de la démocratie » ou « la lutte contre le terrorisme » qui ne sont là que pour semer la confusion. Ne nom de code de l’opération est quant à lui beaucoup plus révélateur de la véritable nature de cette intervention impérialiste que tous les discours de Hollande réunis : « OpérationServal ». Comme n’a pas manqué de le signaler la presse algérienne, il s’agit « d’un petit félin africain qui a la particularité d’uriner trente fois par heure pour marquer son territoire » [1].
Hollande a beau affirmé vouloir en finir avec « lafrançafrique », tourner la page du discours de Da kar de Sarkozy, la politique étrangère du PS au pouvoir reste essentiellement la même que celle de l’UMP : servir et protéger les intérêts des multinationales françaises partout dans le monde, notamment dans ses anciennes colonies africaines. Et l’activité militaire française des derniers mois n’a pas cessé un seul instant. En moins de deux ans Paris est intervenu en Libye [2], où Total a bien tiré son épingle du jeu du repartage du pétrole libyen ; en Côte d’Ivoire, où l’on a expulsé par les armes Laurent Gbagbo du Palais présidentiel de Cocody pour asseoir Alassane Ouattara à la présidence, pour le plus grand bonheur des patrons français ; c’est maintenant le tour du Mali, sans parler du soutien discret apporté à François Bozizé en Centrafrique fin de décembre ou l’intervention en Somalie pour libérer un espion français, « mission » qui s’est soldée par un échec [3].
En tout cas, par la rapidité du déploiement de l’Armée française et les gestes et déclarations politiques depuis quelques mois, il est évident que cette nouvelle intervention impérialiste était planifiée de longue date [4]. L’avancée des forces islamistes vers Bamako, dont les objectifs restent flous, n’a été que le prétexte idéal pour justifier le déclenchement de l’attaque. En effet, le gouvernement français cherche à justifier son action derrière « la lutte contre le terrorisme » et la protection d’un « pays ami ». Bien que le déclenchement de cette intervention semble avoir un caractère assez unilatéral de la part de l’impérialisme français, celui-ci, pour la forme, cherche à lui donner un semblant de « légalité internationale » mettant en avant la résolution 2085 de l’ONU, qu’il a lui-même fait adopter pour justifier une intervention militaire, et l’appel à l’aide du président-marionnette malien, Dioncounda Traoré.
Cependant, les motivations de l’intervention française sont bien ailleurs. Il s’agit, dans le cadre de la crise capitaliste internationale, de garantir notamment de nouveaux secteurs de valorisation du capital impérialiste français à travers le « rattrapage du retard » de l’exploitation des ressources naturelles dans son « arrière-cour » africaine. Ce n’est pas un hasard si récemment en visite en Algérie, Hollande et Fabius ont décroché des contrats pour les entreprises françaises dans le secteur des hydrocarbures. Dans le cas spécifique du Mali, la « stabilisation » du pays est fondamentale pour mener à bien et tranquillement les affaires des multinationales. Et cela, non seulement au Mali mais dans toute la région. Le « respect de l’intégralité territoriale du Mali » n’est aucunement un souci pour l’impérialisme français. C’est d’ailleurs lui qui a tracé à la règle les frontières du pays pendant la période coloniale, du temps de l’Afrique Occidentale Française. Paris veut uniquement s’assurer que les intérêts de ses capitalistes seront préservés et des nouveaux contrats signés, même si pour cela il faut négocier à plusieurs niveaux avec plusieurs interlocuteurs différents, au Sud et au Nord Mali. C’est le sens des négociations plus ou moins indirectes que Paris menait avec certains groupes « rebelles » comme le MNLA, qui aujourd’hui offre ses services à la France pour « combattre les islamistes » en échange de « l’autonomie » de l’Azawad. C’était également le sens des négociations entamées avec Ansar-Dine, avant que ses combattants n’enfoncent la ligne de cessez-le-feu en janvier. L’avancée des islamistes vers le Sud et le fait de ne pas pouvoir compter sur un partenaire « crédible » au Nord ont finalement ait pencher la balance interventionniste de la France.
La France pourra-t-elle tenir toute seule ?
Alors que la France s’est lancé dans cette intervention en prenant de surprise la plupart de ses « partenaires » et qu’elle compterait déjà au moins 1700 soldats au Mali, les autres puissances impérialistes pour l’instant ne s’engagent pas à envoyer des renforts pour les troupes françaises. Seules les troupes de la MIMA ainsi que 2000 soldats tchadiens devraient prendre position aux côtés des Français. Même s’il y a un large consensus et que l’UE et les Etats-Unis déclarent leur soutien politique à l’intervention, la réalité c’est qu’à la différence de la guerre en Lybie où Sarkozy avait réussi à embarquer certains pays impérialistes dans l’intervention de l’OTAN, ce n’est plus le cas aujourd’hui.
Certains analystes signalent déjà cette faiblesse et les risques qu’elle comporte. Ainsi, « quelle que soit l’issue des combats le véritable test sur le terrain sera [la] capacité [de la France] à favoriser la transition politique démocratique, à se garder des errements qui ont suivi les opérations de l’OTAN en Libye, des Etats-Unis en Irak ou de la coalition internationale en Afghanistan. La solitude française, dans un enjeu qui concerne toute l’Europe dans sa façade méridionale, n’est pas tenable… » [5]. Quant à l’attitude des Etats-Unis et son hésitation à répondre à la demande d’aide militaire lancée par la France, on signale que cela reflète la difficulté de Washington à comprendre les objectifs de l’intervention mais aussi le fait que les Etats-Unis défendent leurs propres billes en Afrique de l’Ouest, chasse-gardée française mais sur laquelle ils lorgnent depuis un certain temps.
Mais l’autre difficulté pour Paris, outre la lenteur du déploiement des troupes africaines de la MIMA et des troupes tchadiennes, c’est la faiblesse de son « allié local », l’Armée malienne qui est en plein état de décomposition, même si l’intervention française pourrait entamer un certain processus de renforcement des forces répressives de l’Etat malien (surtout en cas de victoire).
L’Armée française n’amènera rien de bon pour les masses du Mali
« Il en va aujourd’hui de l’existence même de cet Etat ami (…) les terroristes doivent savoir que la France sera toujours là pour soutenir une population qui veut vivre dans la démocratie », poursuivait cyniquement Hollande dans sa déclaration de guerre du 11 janvier. Ces paroles résonnent sont d’autant plus hypocrites qu’en même temps, en France, le gouvernement PS-Verts réprime les mobilisations des sans-papiers, dont une bonne partie sont d’Afrique de l’Ouest, et notamment maliens ! Hypocrites encore lorsque l’on connait les conditions monstrueuses de travail et d’habitation auxquelles ces travailleurs immigrés ainsi que leur famille sont condamnés par le patronat français !
L’entrée des forces armées françaises ne fera que renforcer le pouvoir dictatorial de l’Armée malienne et des hommes du capitaine Sanogo, qui continue à faire la loi à Bamako depuis son coup d’Etat de mars 2012. Le gouvernement fantoche en place vient d’ailleurs d’instaurer l’état d’urgence, ce qui implique une censure totale de la presse et une pleine liberté pour les militaires pour perquisitionner, arrêter et mettre au pas les opposants, à commencer par les militants du mouvement ouvrier et syndical sud-malien qui a mené un certain nombre de combat ces derniers mois [6]. Ainsi, « depuis que l’état d’urgence a été décrété au Mali, le 11 janvier, les contrôles militaires se sont multipliés, notamment autour de Konna, Sévaré et Mopti. A Sévaré, rapporte la FIDH, les services de sécurité maliens procèdent à des fouilles systématiques des passagers aux nombreux check-points (…) Tout ce qui peut paraître suspect est à bannir, comme les longs manteaux d’hiver que portent habituellement les hommes de la ville. “Cela peut cacher des armes, c’est suspect”, rapporte l’habitant. A partir de 19 heures, il n’y a plus personne dans les rues : les militaires ont ordre de tirer sur toute personne qui a un comportement suspect. Cette traque des islamistes présumés se fait avec le soutien et l’aide de la population (…) Parmi les organisations de défense des droits de l’homme, la crainte de voir des règlements de compte tourner en actes de vengeance est grande » [7].
Loin de venir apporter la « paix », la « démocratie » ou de restaurer « l’intégrité territoriale du Mali », l’impérialisme français est intervenu pour défendre ses propres intérêts sur le dos de la surexploitation des travailleurs et du pillage des matières premières africaines. Et pour cela la France n’a jamais hésité, et n’hésite toujours pas, à soutenir les pires dictateurs [8].
En France, « union sacrée » derrière Hollandeet sa guerre !
« Il était grand temps d’agir » s’exclame Jean-François Copé ; « la lutte contre le terrorisme exige l’unité de la Nation au-delà des clivages partisans » explique solennellement François Fillon ; « même si l’unité nationale ne se décrète pas, le rassemblement des forces politiques qui concourent à la démocratie est nécessaire dans ces moments-là » renchérit Jean-Louis Borloo ; même Marine Le Pen, qui crache tant sur « l’UMPS », se félicite « d’une coopération de défense entre nos deux pays, dans une zone francophone » [9]. Un large front s’est donc formé entre les médias bourgeois les plus importants et les différents partis qui défendent les intérêts du capital impérialiste français pour encourager, soutenir et légitimer cette nouvelle « aventure » militaire de leur Armée. Même ceux qui expriment des réserves le font non pas tant sur les objectifs généraux de l’intervention mais sur les méthodes, comme c’est le cas de Dominique de Villepin qui aimerait que Paris ait davantage recours « au dialogue » ou Noël Mamère et certains élu-e-s Verts qui auraient aimé que l’on en discute avant au Parlement.
Mais même du côté de ceux qui se disent « à la gauche de la gauche », tous s’alignent, à leur manière, derrière des intérêts de la bourgeoisie hexagonale. C’est ainsi que Jean-Luc Mélenchon, poursuivant ainsi sans doute sa ligne de « critique constructive », a déclaré dans un premier temps que le fait d’avoir décidé de l’intervention « sans en saisir préalablement ni le gouvernement ni le Parlement » était condamnable et que l’engagement de la France au Mali était « discutable » parce que « les intérêts fondamentaux de la France ne sont pas en cause, selon le chef de l’Etat lui-même, et alors que les troupes africaines sont engagées » [10]. Mais que sont « les intérêts fondamentaux de la France » si ce n’est les intérêts de la bourgeoisie impérialistefrançaise ? Dans un communiqué postérieur, le Parti de Gauche n’a pas hésité à préciser que maintenant que « les opérations sont engagées, qu’elles doivent avoir pour objectif strict d’empêcher la descente vers Bamako [des islamistes] » [11].
Dans cet unanimisme militariste, alors que selon les sondeurs 75% de l’opinion serait en faveur de l’intervention, les déclarations chauvines et pro-impérialistes de Melenchon et de son parti sont d’autant plus scandaleuses que l’on sait qu’avec cette guerre Hollande cherche à gagner du galon et à renforcer politiquement son gouvernement. Cette intervention, pour Hollande, c’est la version militaire, extérieure et brutale de l’offensive hexagonale que mène le gouvernement sur le front de l’austérité et de la réforme du marché du travail.
Il faut combattre « notre » impérialisme ici et maintenant !
Il est clair que l’un des points d’appui pour légitimer l’intervention impérialiste c’est le caractère réactionnaire et antipopulaire des groupes islamistes qui ont pris le contrôle du Nord-Mali. L’épouvantail du « terrorisme islamiste » permet à la France de se présenter comme le « sauveur ex-colonial ». Mais tout ceci est une mascarade. Jamais l’impérialisme ne défend la liberté ni la démocratie. Au contraire, au Mali, cette intervention en appui à un gouvernement fantoche illégitime attaque de front le droit élémentaire à l’autodétermination de l’Azawad. Cet élément d’oppression sur les peuples du Nord du pays et l’offensive militaire française, si elle se poursuit, rendront encore plus difficile pour les travailleurs, les paysans et les peuples du Sud Mali, de se débarrasser de la chape de plomb militaire, de la corruption, des plans d’ajustement dictés par le FMI, autant d’éléments fonctionnels au maintien de l’ordre françafricain.
Mais il y a surtout un autre élément sur lequel le gouvernement PS peut s’appuyer pour continuer sa campagne militaire : le fait que l’unanimisme militariste et chauvin soit entretenu par la « gauche de la gauche » comme nous venons de le voir mais également par les directions des principales forces syndicales du mouvement ouvrier. C’est en ce sens que pour l’extrême gauche, à commencer par notre parti, le NPA, mais également pour Lutte Ouvrière, qui a également pris position contre l’intervention, il serait essentiel d’être à l’initiative de rassemblements contre cette nouvelle guerre impérialiste.
En tant que marxistes révolutionnaires, nous ne nous prononçons pas uniquement contre l’intervention mais pour la défaite de « notre » impérialisme. Evidemment, cela ne veut pas dire soutenir politiquement les forces islamistes qui sont aujourd’hui à la tête de l’offensive. Le programme d’Ansar-Dine et des autres groupes islamistes consiste d’ailleurs, en dernière instance, à renégocier les conditions de subordination de la bourgeoisie malienne vis-à-vis de l’impérialisme, notamment en se liant davantage aux pétromonarchies du Golfe, pourtant de fidèles alliées de l’impérialisme nord-américain. Ce qui est sûr cependant, c’est que tout affaiblissement ou remise en cause de la puissance française ne pourrait que renforcer, localement, la position du mouvement ouvrier et populaire qui lutte pour la défense des intérêts du peuple malien, contre la bourgeoisie locale aux ordres des multinationales françaises. C’est aussi pour cela qu’on ne peut que souhaiter que l’armée française se heurte à la résistance la plus dure possible et que son offensive soit mise en échec.
Mais une victoire de l’Armée française au Mali aurait également un impact extrêmement négatif pour notre classe. Cela renforcerait le gouvernement et le patronat et lui donnerait encore plus de marge de manœuvre pour approfondir son offensive. Ceux qui font de juteux profits en Afrique sont les mêmes qui nous licencient ici en France. C’est pour cela que, par delà les positions que devraient défendre les révolutionnaires, l’extrême gauche devrait se donner les moyens de défendre des positions internationalistes élémentaires en proposant à l’ensemble des organisations du mouvement ouvrier et de la jeunesse, syndicales comme politiques, d’appeler, là où c’est possible, au moins à Paris, à un rassemblement dans les plus brefs délais contre l’intervention.
A bas l’intervention impérialiste, avec ou sans mandat de l’ONU ou du Parlement !
Non à l’ouverture de l’espace aérien algérien aux bombardiers français !
Pour le droit à l’autodétermination de l’ensemble de l’Azawad et des peuples du Mali !
Retrait de toutes les troupes françaises d’Afrique et des terrains d’opérationextérieurs !
18/01/2013.
[1] Le Monde, « La presse algérienne critique l’attitude “coloniale “de la France au Mali », 14/1/2013
[2] Voire : C. Tappeste « Une victoire de l’impérialisme qui menace le printemps arabe » (http://www.ccr4.org/Une-victoire-de-l-imperialisme-qui).
[3] A noter également que depuis 2008 la France est l’une des principales contributrices de l’Opération Atalante, au large des côtes somaliennes. Les navires de guerre et les avions français contribuent à « sécuriser » le golfe d’Aden, ou plutôt à sécuriser le passage des navires de commerce et des tankers, et ce pour le plus grand bénéfice des armateurs internationaux. L’autre enjeu de l’Opération Atalante et d’appuyer la force de l’ONU en Somalie, l’AMISOM, qui soutient à bout de bras le gouvernement fantoche aux ordres des impérialistes de Hassan Sheikh Muhamud.
[4] Voir : Loïc Guillaume, « Ingérence diplomatique et projet d’intervention militaire de la France au Nord-Mali » (http://www.ccr4.org/Ingerence-diplomatique-et-projet-d-…-Mali).
[5] Le Monde, « L’intenable solitude française au Mali », 17/1/2013.
[6] En juin dernier, les mines d’or étaient bloquées par un important mouvement de grève. Début septembre, c’était au tour des travailleurs de l’aéroport de Bamako de se mobiliser, suivis des enseignants du supérieur, l’un des secteurs les plus combatifs du pays ces dernières années. Fin octobre, les éboueurs de Bamako étaient également en grève. Systématiquement, les grévistes ont retrouvé l’armée face à eux.
[7] Le Monde, « Les allégations sur des exactions de l’armée malienne se multiplient », 15/1/2013.
[8] Voir à ce propos l’article de Loïc Guillaume et Marah Macna « Retour sur quatre mois de gestion « socialiste » de l’impérialisme » (http://www.ccr4.org/Retour-sur-quatre-mois-de-gestion-s…lisme).
[9] Le Monde, « Intervention française au Mali : large consensus autour de la décision du président Hollande », 11/1/2013.
[10] Idem.
[11] « Rompre avec la logique guerrière », déclaration du 15/1/2013 (http://www.lepartidegauche.fr/actualites/communique/mal…20325).
http://www.ccr4.org/A-bas-l-intervention-francaise-au-Mali
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L’internationalisme dont nous parle ce texte n’a certainement pas la signification que lui donnent les communistes internationalistes ; on peut juste rappeler que lors de la première Guerre du Golfe, les trotskistes avaient soutenu… Saddam Hussein, c’est-à-dire un dictateur qui les aurait fait exécuter s’ils avaient été présents en Irak ! Tout cela sous couvert d’être « pour la défaite de « notre » impérialisme »…
Il faudrait aussi démontrer que « tout affaiblissement ou remise en cause de la puissance française ne pourrait que renforcer, localement, la position du mouvement ouvrier et populaire qui lutte pour la défense des intérêts du peuple malien, contre la bourgeoisie locale aux ordres des multinationales françaises. C’est aussi pour cela qu’on ne peut que souhaiter que l’armée française se heurte à la résistance la plus dure possible et que son offensive soit mise en échec. », ce qui revient, de facto, à prendre parti militairement et à soutenir une guerre longue, dont les exploités et opprimés paieront évidemment les pots cassés…
Du reste, cette affirmation que « tout affaiblissement ou remise en cause de la puissance française ne pourrait que renforcer, localement, la position du mouvement ouvrier et populaire qui lutte pour la défense des intérêts du peuple malien » vaudrait d’être démontrée, et elle ne l’est pas.
Quant au « droit à l’autodétermination de l’ensemble de l’Azawad et des peuples du Mali », je ne sais pas d’où ça sort, mais jamais les communistes n’ont défendu ça ! L’internationalisme ne consiste pas à soutenir la création de nouvelles nations, c’est-à-dire une division de plus des exploités et opprimés, ni le nationalisme qui va avec par-dessus le marché !
“Les trotskystes ont soutenus Saddam Hussein”, ils seraient bien de préciser qu’elles organisations sont visées, englober toutes les organisations se réclamant de Trotsky en leurs prêtant qui plus est de telles positions relève soit d’un gauchisme primaire soit de tendance calomnieuse, en tout les cas une faute politique.
Tout comme l’est le fait de refuser de prendre position sur un conflit armé au nom d’un internationalisme de salon, cela ne va pas sans rappeler l’attitude de la Fédération Anarchiste qui lors de la guerre d’Algérie refusa de soutenir la lutte d’émancipation des algériens vis à vis de l’impérialisme français, sous prétexte que cette lutte était de nature nationaliste. Avec de telles attitudes ces “internationalistes” ne peuvent pas se targuer d’avoir des organisations fraternelles dans les pays qui eurent à faire avec l’impérialisme.
Pour ce qui est du droit à l’autodétermination des nations opprimés, bien sur que les communistes l’ont toujours soutenu. Les luttes émancipatrices, démocratiques des peuples opprimés sont un objectif affirmé par les communistes, et de surcroit une très bonne école pour que le prolétariat prenne conscience de sa force.
La social-démocratie française, soutenue par les organisations bourgeoises (des verts jusqu’au FN) et par les organisations réformistes du front de gauche, explique combattre l’islamisme au Mali quand elle compte sur ces mêmes barbares religieux pour mater le prolétariat maghrébin. En aucun cas elle n’intervient pour une autre raison que celle de défendre le capitalisme français et pour cela, cette guerre, ce conflit, quelque soit le nom que l’on lui donne doit être combattue par la classe ouvrière.
C’est bien dans le style du CCI de dire que “Les trotskystes ont soutenus Saddam Hussein”. Pour ces gens-là, tous ceux qui s’opposent aux guerres impérialistes et coloniales sont des soutiens des dictatures. On reconnaît bien là les méthodes staliniennes pour discréditer ceux qui ne d’alignent pas sur leurs positions. Calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque chose… Le stalinisme ne se reconnaît pas à des déclarations de principe, mais à une pratique sur le terrain, et le CCI est en bonne place sur la liste des candidats.
Ironiquement, c’est à la Fédération anarchiste qu’ils vont trouver leurs seuls alliés dans le refus des luttes contre l’impérialisme et le colonialisme, estampillées « nationalisme », soutien des dictatures, voire même antisémitisme quand l’apartheid sioniste est en jeu.
Les idéologues du CCI sont très forts : ils SAVENT qui est trotskiste ou anarchiste, c’est eux qui ont le monopole de la distribution des étiquettes. En ce qui me concerne, je n’ai jamais rencontré de trotskistes ou d’anarchistes qui soutenaient Saddam Hussein, mais par contre ceux que je fréquente sont évidemment contre les guerres impérialistes. Et on sait ce que le CCI pense des luttes de libération, de l’anticolonialisme et plus généralement de toute forme de résistance.
LO a soutenu Saddam Hussein ouvertement dans sa presse en 1990, je dois encore avoir le « Lutte de Classe » où c’est écrit. On peut aussi ajouter l’OCI – qui devait s’appeler MPPT à l’époque – dans le panier, qui a toujours soutenu les partis « progressistes », soit parce qu’ils étaient staliniens et donc prosoviétiques, soit parce qu’ils étaient, comme le parti Baas irakien, membre de l’Internationale socialiste ! Et que je sache, la LCR n’a jamais été bien claire sur la question, du fait de son « anti-impérialisme ».
Le soutien aux luttes d’autodétermination n’a pour les communistes jamais été automatique. Rosa Luxemburg y était opposée, et même Marx ne soutenait pas toutes les luttes nationales de son époque. Il n’y a que Lénine qui défendait ce soutien. Quant à l’idée que ces luttes nationales permettraient que « le prolétariat prenne conscience de sa force », où et quand les luttes nationales ont-elle jamais permis ça, j’aimerais le savoir ! En tout cas, ce n’est pas en mettant les prolétaires à la remorque d’une bourgeoisie nationale qu’on risque de le voir ! Que je sache, les communistes œuvrent pour l’unité du prolétariat, pas pour sa division !
Les communistes rejettent le nationalisme qui est l’idéologie de la bourgeoisie, et aucune lutte nationale ne peut permettre aux prolétaires de prendre conscience de leur force, de leur unité, puisqu’ils luttent pour les intérêts de leur bourgeoisie nationale et pas pour leur émancipation propre. La Guerre d’Algérie était une guerre impérialiste, et ce n’est nullement un hasard si les États-Unis et la Russie ont toujours soutenu les luttes anti-coloniales, et l’indépendance de l’Algérie par exemple. Y compris matériellement d’ailleurs.
L’internationalisme n’est pas et n’a jamais été « de salon »; il a toujours consisté à s’opposer à l’idéologie nationale, quelle qu’elle soit, et du reste, le soutien à « l’autodétermination des nations opprimées » a démontré largement lors de la Révolution russe toute son ineptie et sa nocivité : le massacre des prolétaires finlandais et ukrainiens par les troupes allemandes suite à « l’indépendance » de la Finlande et de l’Ukraine en sont des preuves claires ! Qu’est-ce que la classe ouvrière a à gagner à se battre pour une nation supplémentaire, je ne vois pas. D’autant que pendant la Guerre froide, les luttes de libération nationale n’étaient rien d’autre que le champ de bataille des deux blocs impérialistes qui s’affrontaient ! Qu’est-ce que les prolétaires vietnamiens ont bien pu gagner à soutenir un camp ou l’autre, il serait bon d’être un peu plus précis sur ce point…
Le véritable problème du Trotskysme, historiquement, a été son incapacité à comprendre ce qu’est l’impérialisme ; Trotsky, déjà de son vivant, n’avait pas compris que l’URSS était redevenu sous Staline un pays impérialiste ; il n’a pas non plus compris que l’impérialisme est un phénomène général, que toutes les nations sont impérialistes du fait des conditions économiques régnant dans « la période des guerres et des révolutions ». L’impérialisme, contrairement à l’idée développée par Trotsky, ne se limite pas à l’exportation de capitaux ; elle est pour chaque économie nationale la recherche constante à l’extérieur de ses frontières des conditions de son développement intérieur. C’est un phénomène lié à la crise permanente de surproduction que connait le capitalisme depuis la Première Guerre mondiale.
Par conséquent, tout soutien à une nation quelle qu’elle soit est un soutien à une bourgeoisie aussi rapace et impérialiste que n’importe quelle autre, un soutien à l’idéologie nationaliste qui est une arme de combat de la classe dominante contre les exploités et opprimés, un outil de division de la classe ouvrière. Ça n’a rien à voir avec l’émancipation des exploités, ni avec la destruction de l’ordre capitaliste. Au contraire !
Ainsi toute les nations seraient impérialistes? Donc le Mali par exemple, vu que c’est un sujet d’actualité serait un impérialisme, sans armée, sans institution étatique solide (Un coup d’état vient de s’y faire). Cette vision simpliste ne doit pas rendre une analyse de la lutte des classes à l’échelle mondiale aisée.
L’impérialisme ne se définit pas par le simple fait de remédier à la baisse nationale du taux de profit en exploitant la main d’oeuvre étrangère, en exploitant des matières premières étrangères… Il est l’expression du repli de la bourgeoisie face aux crises du capitalisme, ce repli se traduit par l’hypertrophie de l’appareil d’état sous l’impulsion et au bénéfice de la bourgeoisie, par la mainmise capitaliste via le biais de l’intérêt national sur les politiques étrangères, symptôme de la défiance du capitalisme face à ces concurrents étrangers.
Tant que j’y suis ni Marx, ni Engels, ni Luxembourg n’ont jamais parlé d’une crise permanente de surproduction, et je mets quiconque au défi de me prouver le contraire. Marx a théorisé les crises régulières (et non permanente) du capitalisme comme étant le fruit de la baisse tendancielle du taux de profit, certes par moment ces crises peuvent revêtir la forme de crise de surproduction mais en ce cas cela n’en serait qu’un symptôme et jamais une cause.
Pour ce qui est de l’intervention actuelle de la France au Mali, il ne s’agit de rien d’autre que d’un impérialisme partant en guerre pour le profit de son capitalisme national, et là dessus les révolutionnaires ne peuvent souhaiter que ça défaite. Je ne nie pas que bien souvent les organisations réformistes et centristes (LO, LCR, OCI…) se sont cachées derrière cette attitude prolétarienne pour masquer leurs soutiens à des organisations nationalistes petites bourgeoises (La LCR soutenait le FLN en Algérie lorsque l’OCI choisissait le MNA, aucune n’a jamais appelé à la construction de parti révolutionnaire dans ces pays). Ce ne fut pas le cas de Trotsky qui militait pour l’indépendance de la classe ouvrière face aux nationalistes mené par Tchang Kai Chek en Chine par exemple.
Toutefois adopter une stratégie de neutralité en ces moments c’est apporté un soutien tacite aux interventions impérialistes et faire le jeu du capitalisme qui y recourt.
Ce n’est pas parce qu’un État capitaliste est en pleine déliquescence – ce qui est le cas de l’État malien, c’est clair – que sa nature change ! L’État capitaliste est impérialiste par essence, du fait de sa fonction et des intérêts nationaux qu’il défend, ainsi que du fait que l’économie de chaque État ne peut se suffire à elle-même du fait, justement, de la surproduction. Quant à « l’analyse de la lutte de classe », je ne vois pas du tout ce qu’elle vient faire là. L’État capitaliste défend les intérêts de la bourgeoisie nationale, point-barre ! Il est et restera l’ennemi de la classe ouvrière, jusqu’à sa disparition qui ne peut intervenir que par la disparition des classes. C’est du Lénine de 1917.
Du reste, l’impérialisme de l’État malien se traduit par sa volonté de récupérer sa partie nord. Qu’il n’en ait pas les moyens ne change rien à cette volonté, ni au fait qu’il est par conséquent très content que les Français viennent faire le boulot !
Quant à d’autres États tout aussi mal en point, prenons par exemple le Tchad : comment expliquer autrement que par son impérialisme propre sa participation à l’expédition au Mali ?… On en reviendra de toute façon à ça : tous les États sont impérialistes, à la mesure de leurs moyens…
Effectivement, ni Marx, ni Lénine n’ont parlé d’une crise permanente de surproduction. Mais Luxemburg a bien mis en exergue que la baisse tendancielle du taux de profit est contrebalancée par l’extension du marché ; dès que cette extension n’est plus possible – et c’est ainsi qu’elle analyse la Première Guerre mondiale – c’est le signe que la crise de surproduction devient permanente. Après, la bourgeoisie ne peut plus que tricher avec ses propres lois économiques, ce qu’elle fait déjà depuis 1929.
C’est le fonctionnement même des rapports de production capitalistes qui génère la surproduction, et c’est justement parce que Marx n’a pas pu tirer les conclusions de ce fait que Luxemburg a écrit L’Accumulation du Capital. Elle y montre que la surproduction est le fondement même du capitalisme. L’impérialisme est l’une des réponses à ce phénomène, ce qui le rend par conséquent inévitable et partagé par tous : il faut trouver des débouchés, des marchés, des moyens de les protéger, en développant une intervention tous azimuts vers l’extérieur. C’est bien pour cela que Lénine a intitulé son livre L’Impérialisme : stade suprême du capitalisme.
Quant à l’intervention au Mali, attention à ne pas chercher uniquement des avantages économiques immédiats, le fonctionnement de la bourgeoisie est très souvent plus profond que ça. Ceci dit, il est certain que la France intervient pour défendre son arrière-cour africaine.
Quant à la « stratégie de neutralité », comprendre les choses ainsi relève d’une incompréhension : les communistes défendent les intérêts DU PROLÉTARIAT, pas ceux d’une bourgeoisie ou d’une autre. Et ici, les intérêts des exploités sont justement de ne pas se laisser embarquer dans le nationalisme par l’un ou l’autre camp.
Non mais vous êtes sérieux la? J’ai du supprimer 6 commentaires qui s’enlisaient une énième fois en querelles de clochers. Indymedia est un site d’information, donc merci d’arrêter à chaque fois de vous sentir obligés de défendre vos chapelles respectives.
On a compris, vous êtes pas d’accord, maintenant on arrête de troller partout et tout le temps. L’auto-modération c’est bien aussi, donc quand on s’énerve, on clique sur la croix en haut à droite/gauche de l’écran, on va faire un tour et on revient calmé.
Hé Ho !?!?!?
Vous vous rendez-compte de ce que vous faites ?
Vous vous querellez allègrement en cherchant la petit souri entre vous, et quand un HUMAIN vous dit que vous débordez et que c’est contraignant, vous n’en tenez pas compte tant vous êtes pris dans votre jeu… Vous ne lui répondez même pas, ne vous excusez pas, vous continuez de plus belle ?
Et ensuite vous comptez être crédibles avec vos leçons sur l’impérialisme et la colonisation ?
Et si indymedia nantes était un territoire avec des autochtones, vous pensez dégager quel symbole par vos attitudes, là ?
Transposer le global au local, ça fait pas de mal des fois.
Respirer et sortir aussi.
Merci.