Le voyage à disneynantes
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Catégorie : Local
Thèmes : Art/cultureMétropoleNantes nécropoleVoyage à nantes
Lieux : Nantes
Salut à toi qui arpente cette ville.
Sais-tu que tu te trouves actuellement dans la solution d’un inextricable problème économique ?
Comment doper l’économie d’une ville pendant les 2 mois d’été quand on n’a ni la mer ni la montagne ?
Nombre de décideurs et d’économistes se sont posés la question et ici, a Nantes, ils ont trouvé.
La solution est simple et, comme toutes les autres formes de tourisme, elle permet de faire venir des milliers de personnes et des millions d’euros, elle permet de les balader aux bon endroits et de leur raconter la vraie Histoire. Ce tourisme, c’est celui auquel tu participe si, toi aussi, tu te ballades gaiement le nez en l’air, d’œuvre en œuvre. Ce tourisme c’est la Culture, ce tourisme c’est « Voyage a Nantes ».
Et oui, tu croyais quand même pas qu’une ville, de plus en temps de crise, allait dépenser 8,1 millions d’euros (1570 ans de RSA) histoire de te faire plaisir ? T’as vraiment cru que c’était au nom du sacro-saint « Art » que l’on te faisait découvrir les bars du Hangar a Banane, les vitrines des Galeries Lafayettes ou le passage Pommeraye ?
Non, l’Art n’est qu’une bonne exuse pour t’envoyer te promener dans leurs galeries marchandes et espérer te piquer ton petit « budget-vacance » quand tu auras trop faim ou trop soif.
Et puis c’est bien pratique d’estampiller « Œuvre d’Art » sur tout cet urbanisme aseptisé, cela le dresse sur un piédestal, l’élève au rang du Divin incritiquable. Car c’est bien de cela qu’il s’agit : empêcher toute forme de critique, créer le consensus, bref, faire de l’émotion pour éviter la réflexion.
Plus besoin de s’étendre sur des questions embarrassantes comme : « c’était comment l’Ile de Nantes avant ? » Ils se contenterons de répondre : « un quartier marqué d’un côté par les anciennes halles de production d’Alstom et de l’autre par de multiples témoignages de l’aventure de la construction navale […] » et ils s’empresseront de rajouter dans la même phrase « […] vous pénétrez sur un territoire dédié aux industries créatives et culturelles […]. [1] » Et va que d’un tour de passe-phrase je t’efface 250 ans d’histoire ouvrière et passe sous silence que pour réaliser leur « promenade culturelle 1» il a fallu expulser des dizaines de personnes…
Ils sont tellement sûr que leur urbanisme est incritiquable qu’ils se permettent même de qualifier la petite amazonie de « compte de fées du progrès » en expliquant que « si un projet autoroutier a finalement permis à la nature de s’épanouir, alors [leur] œuvre permettra de pénétrer encore plus en avant le milieu urbain 1». L’œuvre en question ? Une autoroute en bois avec son péage… Peut-être pourrons nous l’emprunter pour aller visiter la « ferme pédagogique » dans le futur « aéroport vert »… Sans blague ! On nage dans la propagande pure.
Malheureusement ce n’est ni une blague ni de l’ironie artistique, c’est bien ce genre de déclarations qui paraissent chaque jour dans les canards locaux pour nous convaincre du bien fondé du développement (économique) durable. Et c’est sans honte qu’ils érigent des œuvres à la gloire du capitalisme.
A l’heure de « l’Europe des régions » le social a depuis bien longtemps laissé la place à la compétitivité. La ville n’est désormais plus qu’une entreprise où il faut sans-cesse innover, attirer, rentabiliser ; elle doit devenir un pôle Européen. Alors en enrobant tout ça de culturel et de vert-écologique, ils n’hésitent pas à imposer une urbanisation sans limite, quitte à nous faire croire que la métropole « Nantes-St Nazaire » a une identité propre. « La programmation artistique s’inscrit de fait dans une logique de développement du territoire et déborde le cadre traditionnel des biennales d’art contemporain. Estuaire accompagne et stimule un projet politique : la construction de la métropole Nantes-St Nazaire [1] ». Nantes la blanche, avec St-Nazaire la rouge, le PS a bien enterré Marx…
Avec Estuaire il y a clairement la volonté de coloniser les bords de Loire. La population se déplace alors dans un territoire où elle ne serait jamais allée et avec un peut de chance et des loyers modérés elle voudra même s’y installer. On déploiera bien évidement toutes les infrastructures pour faciliter ce déplacement : piste cyclable, bateaux, visite guidée, ect… C’est qu’il y en a derrière la Culture !
Ce développement écrasant se fait ressentir de partout, il condamne des milliers d’hectares pour des projets plus verts que vert comme les plus grosses éoliennes offshore, la nouvelle raffinerie de Donge à l’huile végétale ou l’aéroport HQE (Haute Qualité Environnementale) de Notre-Dame-des-Landes.
Mais nous le sentons aussi dans la ville avec leur projet « Cœur de Nantes » où est réduit à néant les vies de quartier. Les bars sont mutés sur l’Île de Nantes et si ils refusent, on leur interdit les concerts. Les épiceries sont de plus en plus contrôlées alors qu’un énorme centre commercial va bientôt ouvrir au cœur de la ville. Les SDF, quand ils ne sont pas chassés physiquement, se voient supprimer les derniers « spots de manche » et n’ont plus un seul banc ou abri pour dormir. Ils vont même jusqu’à fabriquer des poubelles souterraines empêchant toute récupération ou, à défaut, toute barricade…
Mais pour éviter que tu ne vois tout ça on te demande gentiment de suivre la ligne rose et d’aller t’émerveiller devant les Machines de l’Île où on te montrera combien la ville investit dans la Culture. On oubliera juste de te dire que les trois quarts des subventions sont pour 4 ou 5 grandes institutions culturelles et qu’a côté crèvent un par un les derniers petits théâtres ou compagnies de la ville. Et on te dira encore moins comment ils expulsent les rares lieux qui tentent de créer une culture alternative, subversive et populaire.
C’est avec cette même prétention que l’on te montrera le Tribunal, cette magnifique œuvre symbolisant « la puissance et la force de la justice [1] » qui, avec tout ses barreaux et son noir-tristesse, rappelle surtout que c’est la grande porte pour la taule. C’est ici que l’on enferme à tour de bras les pauvres et prononce la relaxe quand un flic mutile[2]. D’ailleurs faudrait peut-être aller dire aux artistes de « Factorev » (exposition d’objets récupérés en déchetterie) qu’ils se méfient du tribunal parce qu’on en a vu se faire condamner pour avoir récupéré une machine à laver. Ha non, c’est vrai, ils n’ont rien à craindre eux, ils ne sont pas Rroms…
Mais non, les décideurs ne sont pas racistes, la preuve ils ont même fait le mémorial de l’abolition de l’esclavage… Et c’est d’ailleurs bien là le problème. Ce mémorial commémore les gentils et courageux abolitionnistes occidentaux et passe sous couvert les propre luttes des esclaves. Ce mémorial veut nous faire croire que le passé esclavagiste de Nantes est « exhumé, exploré, analysé, compris, assumé 3» bref finis. Or le capitalisme n’est que le prolongement du commerce triangulaire et Nantes y participe toujours. C’est une bien triste ironie que de savoir que ce mémorial à été construit par Vinci, colonialiste moderne, qui fait mourir ses ouvriers dans les mines d’uranium au Niger.
Il est des réalités que Nantes préfére effacer…
Comme ce tag sur un mur pourtant légal, mais où il était écrit « Où sont passés les gens du voyage a Nantes ? » Quelqu’un(e) a osé faire de l’Art un sujet politique ?! Il sera effacé [3] jours après sa réalisation et la mairie dira que c’était une erreur… Comme ces campements de Rroms expulsés en dehors de toute procédure légale ? Ici on écrit pas n’importe quoi ni n’importe où, on est en démocratie (participative) ! Alors on autorise 10 murs sur toute l’agglomération et on exerce un droit de censure regard dessus. Comme ils ont conscience que le tag fait partie de la « culture urbaine » et que toute cultures rapporte, autant l’exploiter. Oui à une culture « populaire » mais qu’elle soit lisse, blanche et propre. Il n’est pas question que n’importe qui se réclame tagueur-euse, il faut avoir du talent ! La culture populaire doit être une affaire de professionnels. Puis ce sera l’occasion d’un grand ménage de printemps, on met les « meilleurs » graffeurs dans le cadre de l’expo « Over the wall », et les autres sous le coup de la loi[4] après avoir soigneusement effacer leurs œuvres…
Voyage à Nantes, et plus généralement la culture institutionnelle, participe et est une raison au développement économique de la ville, à son urbanisation frénétique et à sa politique d’aménagement. C’est grâce et en partenariat avec les « grands acteurs culturels[1] » que Nantes se transforme pour le compte de quelques notables locaux.
Ils veulent une ville vitrine, sans tags, sans chiens et sans pauvre.
Une ville ou les touristes se sentent bien et où les riches sont les rois.
Une ville truffée de caméras de surveillance et de puces RFID.
Une ville sans ruelle dépavée mais avec des boulevards sécurisés.
Une ville où l’on ne fait que passer, visiter et payer.
Une ville où l’on ne discute plus et où s’organiser devient impossible.
Une ville où l’on chuchote.
Une ville où la population et les murs sont blancs.
Une ville où le peuple est muet.
Une ville où il n’y aura plus d’odeurs car l’argent n’en a jamais eu.
Une ville qui n’en sera plus une mais qui leur rapportera…
Tu veut résister ?
Commence par ne plus cautionner !
Un-e rat-te des villes
Pour que crève leur Culture, le capital et le pouvoir
Cultivons la subversion, l’entraide et l’autogestion !
[1]. Citation du programme Voyage à Nantes.
[2]. Le 03/04/2012 le tribunal relaxe le policier qui, avec un tir de flash-ball, a fait perdre l’usage d’un œil à un lycéen de 16 ans.
[3]. Citation de Jean-Marc Ayrault.
[4]. Un-e tagueur-euse risque 30 000 euros d’amende et 2 ans de prison…
Salut à toi auteur,
Permet moi de te dire que tu as peut être raison. Peut être bien que tout ça a été fait pour attirer le touriste, etc.
Mais… On s’en fout. Sérieux, j’ai passé un été génial à Nantes, j’ai trouvé que c’était vraiment intéressant comme principe, ca m’a fait découvrir des choses, à moi et à toutes les personnes que je connaissais. Quand on arrive au stade où tu es, à critiquer incessament tout et n’importe quoi, autant aller vivre en forêt et manger des fruits.
Pasque là c’est stupide, tout simplement. Et cette espèce de défiance systématique que l’on retrouve souvent sur indymedia par rapport à tout et n’importe quoi est juste gavante. C’est vraiment un aspect totalement anarcho éthylique, critiquer, critiquer, sans arrêt, la moindre initiative qui ne vient pas directement du peuple.
Le principal c’est que ca ait plus à tout le monde, même si quelques illuminés dans ton genre trouveront toujours à redire.
A plus!
Comme le sujet est plus que jamais d’actualité cette année, je crois que LE VOYAGE A NANTES, tout comme le HELLFEST dérivent vers ce que l’on craignait, la marchandisation de la culture. Je me permets de rebondir sur ton commentaire: “C’est vraiment un aspect totalement anarcho éthylique, critiquer, critiquer, sans arrêt, la moindre initiative qui ne vient pas directement du peuple”. pas besoin d’être anarchiste pour s’en apercevoir, la preuve:
http://www.lesinrocks.com/2014/03/05/actualite/special-municipales-la-culture-nantes-par-ceux-qui-la-font-11485407/
Et puis les réflexions,l’esprit critique “sur tout et n’importe quoi”, peuvent faire avancer les choses dans le bon sens. Tu dois sans doute faire partit de ceux qui mangent,consomment sans se poser de questions!