Lettre ouverte de federico fasano mertens: de hitler à bush
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Il ne s’agit pas, pour le journaliste, de se livrer à ce rapprochement à la seule fin de dénigrer le président états-unien. Au contraire, il met en balance le régime de Washington et le Troisième Reich sur les plans idéologique, diplomatique, économique et militaire. Federico Fasano Mertens compare aussi la prise de pouvoir des deux hommes. À la différence du dictateur allemand, George W. Bush n’a pas été démocratiquement élu, mais, comme lui, il a appuyé son pouvoir par un évènement traumatisant que l’auteur désigne comme « l’incendie du Reichstag américain ».
Federico Fasano Mertens
Directeur du quotidien urugayen
La República.
, Il y a quelques jours Martin Silverstein, ambassadeur des États-Unis d’Amérique en Uruguay, m’a envoyé une lettre dans laquelle il accusait le journal uruguayen La República – quotidien que j’ai l’honneur de diriger – de manquer « de toute mesure d’intégrité journalistique » pour avoir comparé leur président, George W. Bush, avec le chancelier du Troisième Reich allemand, Adolf Hitler.
Je n’ai pas pu lui répondre avant, car l’acte de piraterie internationale que les États-Unis ont commis en attaquant un peuple sans défense et presque désarmé avec la plus formidable machine à tuer dont l’histoire universelle se souvienne, m’a obligé à consacrer plus de temps que d’habitude à la préparation des éditions spéciales sur le carnage en Irak. J’étais également fort occupé à faire condamner devant la justice – et avec succès – des tortionnaires uruguayens entraînés aux États-Unis, qui étaient en train de me calomnier.
Il y a quelque temps, l’ambassadeur était venu me rendre visite à mon bureau et j’avais mentionné à mes collaborateurs qu’il était l’ambassadeur des États-Unis le plus intelligent, le plus perspicace et le plus sympathique que j’avais connu : « Enfin, avais-je dit, un représentant de l’Empire avec qui on peut discuter sur des thèmes en dehors des habituels clichés insipides et ennuyeux qui nous intoxiquent dans ces réunions que nous devons partager. »
Mais la sagacité de l’ambassadeur n’a pas pu lui épargner le malheur d’avoir à représenter le 43e Président de son pays, George Bush Junior, un fanatique paranoïaque, intoxiqué de messianisme, moins brillant qu’une limace, ivre de pouvoir comme il l’a été, par le passé, d’alcool (il fut condamné le 4 septembre 1976 pour un important excès de vitesse en état d’ébriété après avoir été interpellé par le célèbre prédicateur Graham qui lui demanda : « Qui es-tu pour te croire Dieu »), militant de la Christian Right (la droite chrétienne texane et sudiste), raciste amoureux de la peine de mort, surtout lorsqu’elle s’applique aux Noirs, enfin le pire président américain de ce dernier siècle, qui a su engendrer des tragédies contre son propre peuple, bref, l’autre face de l’homo sapiens, l’incarnation même de l’homo demens.
Comme tout bon raciste, il est aussi misogyne. Personne ne peut oublier les humiliations publiques faites à son épouse, Laura Bush, lorsque le Président expliqua à la presse que sa femme ne l’accompagnait pas ce jour-là « parce qu’il avait plu et qu’elle devait balayer l’entrée de la maison puisque le lendemain le président de Chine, Jiang Zemin, devait leur rendre visite dans leur ranch de Crawford (Texas). »
Son compatriote, le vieil écrivain Kurt Vonnegut n’a pas hésité un seul instant à le décrire comme étant le « plus sordide et pitoyable usurpateur d’opérette qu’il soit possible d’imaginer ».
Mais allons droit au but. Que l’ambassadeur américain garde sa pathétique mésaventure d’avoir à défendre le plus délirant des habitants de la Maison-Blanche et moi, l’honneur de lui faire un procès avec l’arme la plus redoutable : la parole.
Il s’agit de comparer Adolf Hitler et George W. Bush.
Il y a, bien évidemment, des différences. La première consiste en ce que le criminel de guerre, auteur du massacre du peuple juif et du peuple soviétique, avait gagné les élections avec une large majorité, alors que l’autre criminel de guerre, auteur du massacre du peuple irakien, est arrivé au pouvoir de manière frauduleuse, à travers le plus grand scandale électoral de toute l’histoire américaine.
D’un point de vue théorique, la comparaison entre Bush et Hitler est correcte. Les spécialistes ont défini le nazisme comme étant la dictature terroriste du capital financier en expansion. Lorsque Bush devient un hors-la-loi en envahissant une nation sans défense, qui ne l’a pas agressé, pour s’emparer de ses richesses pétrolières – la deuxième plus grande au monde – et qu’il annonce peu après que d’autres nations pourvoyeuses de pétrole pourraient subir le même sort, il s’approche de la définition de la dictature terroriste du capital financier. Que cela lui plaise ou non.
George Bush porte le nazisme dans ses gènes.
Son grand-père, Prescott Bush, fut déjà l’associé de Brown Harriman et l’un des propriétaires de l’Union Banking Corporation. Ces deux entreprises ont joué un rôle clé dans le financement qui a permis l’ascension de Hitler au pouvoir. Le 20 octobre 1942, le gouvernement américain ordonna la confiscation de l’Union Banking Corporation, propriété de Prescott Bush, et il saisit les avoirs de la Corporation de Commerce américano-hollandaise et de la Seamless Steel Corporation, toutes les deux gérées par la banque Bush-Hamman. Le 17 novembre de la même année, Franklin Delano Roosevelt confisqua tous les biens de la Silesian American Corporation administrée par Prescott Bush, car elle avait violé la loi du commerce avec l’ennemi. L’arrière-grand-père de notre George, guerrier de Dieu, Samuel Bush, père du nazi Prescott Bush, était la main droite du magnat Clarence Dillon, roi de l’acier et du banquier Fritz Thyssen qui écrivit le livre « I paid Hitler » (« J’ai financé Hitler ») et devint membre du parti nazi en 1931 (Parti ouvrier national-socialiste allemand).
Et si notre ambassadeur a encore un quelconque doute sur l’odieuse alliance des Bush avec Hitler, je le prie de lire le brillant essai de Victor Thorn dans lequel il est mentionné qu’« Une importante partie de la fortune de la famille Bush provient de l’aide financière investie dans le soutien à Adolf Hitler. L’actuel président des États-Unis, ainsi que son père (ex-directeur de la CIA, vice-président et président), ont atteint le sommet de la hiérarchie politique américaine parce que leur grand-père, leur père et leur famille politique ont aidé et encouragé les nazis par le passé. »
Et je ne mentionne encore pas les escroqueries de la famille Bush dont les quatre millions et demi de dollars à la Broward Federal Savings à Sunrise, Floride, ou l’escroquerie faite à des millions d’épargnants de la Banque d’Épargne Silverado (Denver, Colorado).
Arrière-grand-père nazi, grand-père nazi, père qui n’a pas eu le temps de le devenir car Hitler s’était déjà suicidé dans les jardins de la Chancellerie en ruines, George a bénéficié de la fortune mal acquise de ses ancêtres.
Mais ne condamnons pas notre homo demens pour ses gènes obscurs.
Jugeons-le seulement sur ses actes. Et comparons. Comparons seulement.
Comment Monsieur l’ambassadeur croit-il que le délirant caporal allemand est arrivé au sommet du pouvoir ? Hitler arrive au pouvoir à travers des élections propres, mais il se heurte à la Constitution de Weimar qui lui impose des limites que son omnipotence refuse d’accepter. Il planifie alors l’incendie du Reichstag et en une seule nuit il est couronné en tant que décideur de la guerre ou de la paix.
Ces évènements ne sont-ils pas familiers à notre cher ambassadeur américain ?
L’incendie du Reichstag américain
La destruction criminelle des tours jumelles du World Trade Center à New York fut la même bouée de sauvetage que l’incendie du Reichstag.
Je ne vais certainement pas avoir l’audace de m’associer aux thèses de ceux qui accusent le groupe belliciste « bushien » d’avoir planifié ce massacre ou du moins de n’avoir rien fait pour empêcher cette tragédie alors qu’il savait ce qui se préparait.
Il n’y a pas de preuves réelles pour l’affirmer, malgré le fait qu’il existe de multiples indices de négligence coupable, de vastes soupçons amplifiés par une censure de fer, sans précédent dans la démocratie moderne américaine.
Le jour où le peuple américain aura récupéré toute sa liberté d’information et son droit à connaître la vérité sur ce mardi 11 septembre 2001 (informations aujourd’hui très restreintes par le Patriot Act approuvé avec un seul vote contre – celui d’une femme – symbole de la dignité nationale américaine) on saura alors la raison pour laquelle les nombreux avertissements et mises en garde lancés à travers tout le pays concernant cet acte terroriste n’ont pas été écoutés et pourquoi les avions militaires ont mis quatre-vingts minutes pour décoller et intercepter les appareils détournés, alors que l’on savait déjà peu de temps après leur décollage de Boston, que des pirates de l’air avaient pris les commandes des avions et qu’ils se dirigeaient vers Washington : en cas de détournement d’avion, le manuel d’alerte prévoit une intervention des forces aériennes en moins de cinq minutes.
On saura enfin pourquoi les restes du présumé avion qui s’est écrasé sur le Pentagone ont été cachés. On saura pourquoi le directeur des services secrets pakistanais, qui venait de se réunir à Washington avec Tenet, chef de la CIA américaine, a fait verser par Islamabad – comme l’a révélé le journal conservateur The Wall Street Journal – la somme de 100 000 dollars à Mohammed Atta, chef du commando-suicide contre les Tours Jumelles de New York. Sur cette terrifiante information, il est interdit de faire des recherches, car les libertés civiles ont été suspendues dès que le Patriotic Act fut promulgué.
Finalement on saura également pourquoi quinze des vingt et un ravisseurs du commando-suicide étaient originaires d’Arabie Saoudite, l’un des principaux alliés des États-Unis dans le golfe Persique. Il n’y avait pas un seul Irakien, pas même un seul par hasard.
Mais au-delà des soupçons, il ne fait pas de doute que le déréglé 43e président des États-Unis, couronné dans des élections frauduleuses, dans le cadre d’une impressionnante récession dont on ne voit point la fin, avec le plus bas niveau de popularité au début de son mandat, a réussi à dominer tout le scénario, obtenir des pouvoirs inconcevables auparavant dans une démocratie, être élevé au rang d’Empereur vengeur pour laver l’affront commis par des barbares envers son peuple.
L’incendie du Reichstag américain du 11 septembre a offert à George W. la chance de sa vie.
La moins bonne des victoires électorales d’un président des États-Unis depuis 1876 s’est transformée en une chance historique jamais donnée à un belliciste pour imposer au monde le nouvel ordre américain.
Comme Hitler l’a fait dans le passé en s’entourant de Goering, Goebbels, Himmler, Mengele, Eichmann, à savoir d’une bande d’arnaqueurs semblables à lui, tous fanatisés par le pouvoir et la force, le président texan a cherché à se façonner une cuirasse protectrice par une garde de fer, plus belliqueuse que lui-même, pour le protéger de la tentation du doute et dont les membres portent tous sur le front la même marque que lui : le sceau du pétrole. Le Vice-président Dick Cheney appartenait au groupe Halliburton Oil, le chef du Pentagone, Donald Rumsfeld est issu de la Compagnie pétrolière occidentale, la conseillère pour la Sécurité Nationale, la vieille fille Condoleeza Rice, dont le prénom – ironie du sort – signifie « avec douceur », fut un cadre important de la direction de Chevron et c’est pour lui faire honneur que des bateaux pétroliers ont reçu son prénom. Même la secrétaire du ministère de l’environnement, Gale Norton, est liée au lobby du pétrole, tout comme Bush Senior l’a été avec le groupe pétrolier Carlyle ou l’actuel président Bush Junior avec la Harkins Oil.
Ce quintette de la mort qui entoure le guerrier Bush est une véritable maffiocratie, comme l’a été dans le passé le quintette d’Hitler. Et ils se nourrissent d’une Bible très particulière.
La philosophie de Hegel, Nietzsche, Schopenhauer qui a vivifié et passionné le créateur de l’Holocauste du XXe siècle a été remplacée par des spécimens moins cultivés et d’un niveau intellectuel assez bas, mais plus pragmatiques pour le nouvel Hitler du XXIe siècle.
Qui sont ces auteurs intellectuels inspirateurs de notre quintette belliqueux ?
Le Bostonien Henry Cabot Lodge qui affirme qu’ « au XIXe siècle aucun peuple du monde n’a égalé nos conquêtes, notre colonisation et notre expansion et aujourd’hui rien ne nous arrêtera ». Merse Henry Watterson a déclaré que les États-Unis sont « une grande république impériale destinée à exercer une influence déterminante sur l’humanité et à façonner l’avenir du monde, comme aucune autre nation ne l’a encore fait dans le passé, même pas l’empire romain. »
Ou Charles Krauthammer qui a écrit il y a à peine quelques années dans The Washington Post : « Les États-Unis chevauchent dans le monde comme un colosse. Depuis que Rome a détruit Carthage, aucune autre puissance dans le monde n’a atteint les sommets que nous connaissons. Les États-Unis ont gagné la Guerre Froide, ils ont mis dans leur orbite la Pologne et la République Tchèque, après avoir pulvérisé la Serbie. Et du même coup ont démontré l’inexistence de l’Europe. »
Ou Robert Kaplan qui précise que : « La victoire des États-Unis dans la Seconde Guerre mondiale est aussi importante que la victoire de Rome dans la deuxième Guerre Punique qui la convertit en puissance universelle. »
Ou encore le très connu historien Paul Kennedy qui nous explique que « ni la Pax Britannica, ni la France napoléonienne, ni l’Espagne de Felipe II, ni l’empire de Charlemagne, ni l’empire romain ne peuvent se comparer à l’actuelle domination américaine. Jamais il n’a existé une telle disparité de pouvoir dans le système mondial. »
Ou le directeur de l’Institut des Études Stratégiques Olin de l’Université de Harvard, le professeur Stephan Peter Rosen qui nous dit que : « Notre objectif n’est pas de lutter contre un rival car celui-ci n’existe pas, mais de préserver notre position impériale et maintenir cet ordre impérial. »
Ou l’ineffable Zbigniew Brzezinski qui a déclaré que « l’objectif des États-Unis doit être celui de maintenir nos vassaux dans un état de dépendance, garantir la docilité et la protection de nos sujets et prévenir l’unification des barbares. »
Ou le Président Wilson qui a parlé au Congrès de l’Union « qu’il apprendrait aux républiques sud-américaines de choisir de bons députés ».
Ou le célèbre Billy Sunday qui a fait le portrait du gauchiste latino-américain comme celui d’un type « qui a un museau de porc-épic et une haleine qui ferait fuir un renardeau », il a ajouté que « s’il le pouvait, il les mettrait tous en prison jusqu’à ce que leurs pattes sortent par les fenêtres ».
Écoutons maintenant Dick Cheney, l’actuel Vice-président des États-Unis et le Secrétaire de la Défense, Donald Rumsfeld, qui constituent avec Condolezza Rice un triangle belliqueux plus redoutable que celui des Bermudes.
Le Vice-président Cheney a déclaré avant cette guerre sainte : « Les États-Unis n’ont pas à rougir d’être une superpuissance et ils ont le devoir d’agir avec force pour construire un monde à l’image des États-Unis. » Le chef du Pentagone a été encore plus clair au cas où nous n’aurions pas compris. Rumsfeld a dit en citant la phrase préférée d’Al Capone : « On obtient davantage avec un mot aimable et un revolver qu’avec un mot aimable seulement. »
Le langage qui nourrit l’épiderme et les neurones de Bush est un langage encratique, autoritaire, d’intimidation qui conduit inévitablement à la perversion morale de la fin qui justifie les moyens. La caractéristique essentielle du langage de la « bande Bush », comme pour le langage nazi, est la simplification, le réductionnisme et l’intimidation. Le langage de ce groupe prédateur est un langage schématique, émotionnel, chargé de préjugés qui incite à l’exaltation des sentiments les plus nobles du peuple. Je n’ai pas le moindre doute que Bush se nourrit d’un langage nazi.
Bush ne croit pas, comme Hitler ne le croyait pas non plus, à un État de droit, qui n’est pas l’État qui possède des lois, sinon l’État qui se soumet lui-même à l’empire de la loi et ne peut la transgresser pour aucun motif, et encore moins pour une raison d’État. C’est au nom de la raison d’État ou de la Patrie ou de la Sécurité nationale que sont commises les pires atrocités.
Y a-t-il une différence entre la construction intellectuelle de Bush et celle d’Hitler dans le cadre de la raison d’État ? Je ne le pense pas. Seulement des différences de style, d’époque et de magnitude en ce qui concerne la force utilisée et le pouvoir.
Le discours de la « bande Bush » est un discours de maître à esclave. Il n’y a pas de différences avec le discours de la bande d’Hitler.
L’un est plus gentil que l’autre. Quoique l’histoire est en train de prouver que le moins gentil a été le moins meurtrier.
Civilisation, barbarie, pacification des barbares, peuple élu : jusqu’à la race élue il n’y a qu’un pas. Enfin, tout cela ne nous rappelle-t-il pas l’histoire du psychopathe à la petite moustache ?
En parlant de la petite moustache, le récit d’un conseiller influent de la sécurité américaine qui habite à Washington est très instructif. Il a raconté au magazine argentin Noticias : « Pour le meilleur ou pour le pire George Bush Jr. est l’homme indiqué pour mener cette guerre [NDE : en Irak]. Il est né pour ça. La puissance qui lui vient de l’intérieur le fait trembler. Quand quelqu’un parle avec lui dans son bureau, on dirait qu’il va dévorer celui qui est en face. Il s’assied au bord du fauteuil, presque sans s’appuyer et agite les bras comme s’il ne savait pas quoi en faire. Il a besoin d’action. »
Quelle imitation de la gestuelle du dictateur nazi ! Bien que le flegme du cow-boy texan, revolver à la ceinture, ne ressemble pas à la rage presque épileptique du Teuton, qui s’étouffe en parlant et en gesticulant. Le corps de Bush ne crache pas en parlant. C’est son âme qui crache de la haine et de la violence et engendre la terreur. Mais ça ne lui fait rien. Il doit avoir bien appris le « Oderint dum Metuant » de l’empereur romain Caligula : « Laissez-les nous haïr du moment qu’ils nous craignent. »
L’incontinence émotionnelle de Bush est déjà un classique et, comme Adolf, il ne peut pas admettre un NON. Sa femme Laura Bush a rappelé à la presse que la première fois qu’elle a dit à son mari que l’un de ses discours ne lui plaisait pas, celui-ci, furieux, a fracassé sa voiture contre le mur du garage à l’entrée de leur maison.
Il se sent comme le numen nazi, un envoyé de Dieu, qu’il invoque dans n’importe quelle circonstance. Il a décrété que toutes les réunions de son Cabinet doivent commencer avec une prière. Il dit avoir consulté Dieu avant d’attaquer l’Irak, au mépris de l’opinion de la grande majorité des nations de la planète et des 90% d’êtres humains qui étaient contre. Il essaie d’imiter le président William McKinley lors de l’invasion des Philippines pour évangéliser les indigènes, tout en culpabilisant Dieu de l’avoir forcé à entrer dans ce pays.
Autre coïncidence entre ces vies parallèles qui aurait enchanté Plutarque : tant Hitler que Bush auraient pu éviter de se trouver dans le musée de grands bouffons de l’histoire, s’ils avaient eu un psychanalyste à leurs côtés. Un bon psychanalyste les aurait tous deux aidés énormément à canaliser leur libido vers des occupations plus normales, sublimant ainsi le seul aphrodisiaque qu’ils possèdent, soit le pouvoir universel et cruel sur autrui.
Continuons avec les ressemblances entre le guerrier de la race aryenne et le guerrier de Dieu, comme Telma Luzzani a surnommé notre Texan exalté.
Bush proclame urbi et orbi le bien-fondé de la guerre préventive. Dwight Eisenhower en 1953 n’a pas hésité un seul instant à ce sujet : « La guerre préventive est une invention d’Adolf Hitler. Franchement, je ne prendrais au sérieux aucune personne qui proposerait une chose pareille. »
Demandons-nous : guerre préventive contre qui ? C’est bien connu que la première victime d’une guerre est la vérité. Et la première chose que fait Bush pour fabriquer sa guerre préventive, après l’incendie du Reichstag, c’est de nous mentir façon Goebbels, d’une manière si primaire qu’à la fin personne n’a plus rien cru. D’abord il a dit que l’Irak soutenait Al Qaida. Il a été prouvé peu après qu’une haine irréconciliable existait entre Saddam Hussein et l’ancien employé des États-Unis, Oussama Ben Laden. Puis Bush a demandé d’inclure l’Irak dans le courant fondamentaliste musulman. Difficile à croire, car l’Irak était le pays le plus laïc du monde arabe. Alors on a invoqué les armes de destruction massive. Bush a assuré que l’Irak ne permettrait pas les inspections et quand l’Irak les a permises, il a alors répété que Saddam ne laisserait pas entrer les inspecteurs de l’ONU dans les palais et les endroits stratégiques. Quand il a accepté, l’administration Bush a voulu nous faire croire qu’elles étaient bien cachées. Finalement, on n’en a pas trouvé une seule. Quand tous ces arguments ont été réduits à néant, ils ont alors demandé l’abandon du pouvoir ou l’exil de Saddam Hussein et c’est à ce moment-là, qu’ils ont admis la seule et réelle vérité : nous voulons occuper le territoire irakien quoi qu’il arrive et décider qui va le gouverner. C’est la démocratie planétaire, nous dit-on. Les mêmes opérations manipulatrices de désinformation que Hitler a utilisé contre la Tchécoslovaquie, l’Autriche et la Pologne. Le même type d’excuses changeant au fur et à mesure qu’elles étaient anéanties.
Autre ressemblance : le mépris de la communauté internationale et de l’opinion publique mondiale. Hitler a détruit la Société des Nations fondée en 1919. Bush a réduit en miettes les Nations unies, obtenant contre lui la plus grande opposition à un pays depuis la fondation de l’ONU en 1945 : 170 pays contre la guerre, seulement 30 pays en sa faveur, la plupart d’entre eux des nations émergentes de l’ex-Union soviétique et qui se vendent au plus offrant.
Mais la plus grand défaite diplomatique depuis la fondation de l’ONU n’a été un obstacle ni pour l’un ni pour l’autre. Pour Hitler, le refus et la colère des peuples du monde contre son action ont été sans importance. Bush veut surpasser le Teuton. Les manifestations contre lui – sans précédent sur la planète -, se transforment en musique guerrière à son ouïe wagnérienne. Face à lui, il y a l’esprit de Seattle qui a fondé en 1999 le mouvement anti-mondialisation et pacifiste le plus imposant de l’histoire universelle. Mais rien ne l’arrête.
C’était révoltant de voir comme on a traité Hans Blix, chef des inspecteurs de l’ONU, avec ses 75 ans qui devraient inspirer le respect, originaire de cette merveilleuse ville glacée d’Uppsala, dans une Suède social-démocrate, un digne adepte des traditions démocratiques du martyr Olof Palme.
Le mépris envers les gens et leurs droits est le moteur de son humanisme
Écoutons le maréchal Goering devant ses juges à Nuremberg : « Naturellement, les gens ne veulent pas la guerre, mais après tout, ce sont les dirigeants d’un pays qui déterminent la politique, c’est facile ensuite d’entraîner le peuple. Qu’il dispose de la liberté d’expression ou pas, on peut amener le peuple où l’on veut et lui faire ce que veulent les gouvernants. C’est très facile. Il suffit de leur dire qu’ils sont en train d’être attaqués et de dénoncer les pacifistes pour leur manque de patriotisme qui met le pays en danger. » Ces paroles sont du nazi Goering en 1945 et non celles de Bush. La seule différence, c’est que le nazi Goering l’a dit en allemand et Bush en anglais.
L’invasion d’une nation souveraine qui n’avait agressé personne avait besoin d’une légitimation éthique, bien qu’illicite : renverser le tyran Saddam Hussein et imposer par la force un gouvernement « démocratique et populaire ». Tout cela semble très beau, même si la communauté internationale et les normes qui la régissent en soient le prix à payer.
Mais cela n’est pas vrai. Personne ne met en doute que Saddam Hussein est un sinistre dictateur, qui a assassiné son peuple et que son parti socialiste Bass, n’a rien de socialiste du tout. Mais qui va croire que Bush va instaurer la « démocratie » en Irak, alors que ses prédécesseurs qui ont administré l’Amérique, moins nazis que lui, ont envahi et occupé pendant des années et des années des nations souveraines et ont installé des dictatures féroces qu’ils ont soutenues et protégées contre leur propre peuple ? Par exemple Somoza au Nicaragua, Duvalier en Haïti, Trujillo en République Dominicaine, Pinochet au Chili. Tout comme les régimes fantoches et despotiques qui furent imposés par les nazis lors de l’occupation de l’Europe, y compris la France anti-de Gaulle du maréchal Pétain.
Hitler a envahi l’Europe à la recherche de son Lebensraum, pour étendre son territoire et satisfaire son besoin en matières premières et soutenir le développement économique allemand servant à l’édification du nouvel empire germanique, qui vengerait l’affront du Traité de Versailles. De la même façon Bush va à la recherche de son propre Lebensraum. Un Lebensraum qui dans notre monde d’aujourd’hui ne se mesure plus par la quantité de kilomètres de territoire physiquement occupés, mais par la domination économique et politique qu’on exerce sur ces lieux, dirigée à partir de lointains centres financiers.
Les objectifs de notre nouvel Hitler sont multiples.
Le pétrole
En premier lieu, s’approprier le réservoir d’essence du capitalisme mondial qui n’est autre que le golfe Persique. Bush sait très bien que dans dix ans, le pétrole produit par son pays, locomotive commerciale du monde, s’épuisera irrémédiablement. Dans quarante ans il n’existera plus de pétrole sur la planète. C’est une course contre la montre. Selon la Statistical Review, la découverte de nouveaux gisements pétroliers énergétiques diminue de manière préoccupante. Elle a augmenté seulement de 5% contre 45% lors de la décade antérieure. Les 65% de réserves sont situées au Moyen-Orient. Des 77 millions de barils produits chaque jour dans le monde entier, les États-Unis en consomment vingt millions quotidiennement, mais seulement dix millions sont produits par les Nord-Américains. Ils sont donc tributaires des autres pour rester une superpuissance. L’objectif de l’attaque en Irak, deuxième réserve mondiale pétrolière, était de contrôler ces gisements, contrôler leur prix et leur production. Ne parlons plus d’armes cachées ni de n’importe quoi. Comme l’a dit l’écrivain Eduardo Galeano, si l’Irak était un producteur de radis au lieu de pétrole, qui aurait eu l’idée de l’envahir ?
Pour Bush, le pétrole est là. Il n’y a qu’à le prendre et se servir. Il ne sait pas qu’il peut s’étouffer en mangeant.
Le deuxième coup de Bush consiste à discipliner son allié, l’Arabie Saoudite, premier producteur mondial de pétrole et la plus grande réserve énergétique du monde, dont les prix ne conviennent pas aux intérêts américains. Le troisième objectif, tel que révélé en février de cette année par John Bolton, sous-secrétaire d’État, c’est envahir l’Iran et la Syrie qui, avec la Corée du Nord, constituent « l’axe du mal » et si la situation est favorable, inclure la Libye dans ce saint des saints. Le quatrième pas consiste à détruire l’OPEP et à s’approprier les combustibles fossiles du monde. S’il n’arrive pas à exproprier les gisements fossiles et ne trouve pas à temps de solutions alternatives énergétiques, le capitalisme américain devra modifier le modèle de consommation de son peuple et il risque de perdre le point d’appui de son hégémonie mondiale. Le cinquième objectif est représenté par les fructueuses affaires de la reconstruction de l’Irak sur lequel vont se jeter les quelque 500 transnationales qui contrôlent le monde, la plupart américaines. Le sixième objectif n’est pas moins important et il se nourrit des enseignements de Lord Keynes : utiliser l’industrie militaire pour sortir de la profonde récession dans laquelle est plongée l’économie américaine dont le taux de croissance est zéro. N’oublions pas qu’une guerre ne se gagne pas quand on a imposé la suprématie militaire sur l’adversaire, mais lorsqu’on obtient les bénéfices économiques qui sont la quintessence et la raison de son déclenchement.
Imposer la suprématie du dollar face à l’euro
On ne peut pas continuer sans mentionner le dernier objectif et peut-être le plus important de cette guerre : imposer la suprématie du dollar face à l’euro, qui ces derniers temps n’a pas arrêté de donner une raclée au dollar sur divers fronts inattendus, mettant en danger le privilège et l’importance américaine dans la commercialisation du pétrole. Le dollar a chuté ces derniers mois par rapport à l’euro de 17%, chiffres inimaginables depuis la création de la monnaie unique européenne. La décision iraquienne de libeller 10 milliards de dollars de leurs réserves en monnaie européenne a contribué à cette dépréciation etaprovoqué une secoussesismique pour le dollar. C’est une raison de plus pour attaquer l’Irak, car un gouvernement fantoche et à la solde des États-Unis renverra sûrement ce montant en zone dollar. La Russie libelle ses opérations pétrolières en euros ; l’Iran et d’autres pays de l’OPEP sont en train d’étudier la possibilité d’abandonner le dollar pour l’euro. Les économistes prévoient que si cela arrive, il se produira une dépréciation inusitée du dollar qui fera plonger la valeur des actifs américains, provoquant l’effondrement du géant aux pieds d’argile comme dans les années trente.
L’invasion est aussi due au besoin d’un nouveau partage du monde après l’échec des accords de la triade (États-Unis, Europe et Japon) en 1998 sous les auspices de l’OCDE à Paris et ceux de la réunion de l’OMC à Washington. Il n’y a pas eu d’accord pour la répartition du marché mondial menacé par une diminution du pourcentage du produit brut mondial, qui à la fin du siècle dernier avait atteint un degré de concentration de 50 % dans les mains des membres de la triade et de ses transnationales. L’échec du néolibéralisme pour maintenir le plus grand taux d’exploitation de nations dépendantes, la fatigue et la décadence de l’hégémonie unipolaire et la possibilité relativement proche d’une crise mondiale qui transformerait l’arrogante domination d’aujourd’hui en une hégémonie en haillons, tous ces enjeux sont à l’origine de cet acte de piraterie internationale.
L’Europe n’a pas accepté cette répartition et a attaqué avec son euro. Les États-Unis ont répliqué avec l’instinct des bêtes et s’ils parviennent à contrôler les lacs d’or noir, ils auront du pétrole bon marché et abondant pendant que leurs alliés le paieront cher et ne l’obtiendront qu’au compte-gouttes et leurs économies en souffriront.
Voilà le plan de guerre. C’est le même objectif de domination économique qui a poussé Hitler dans les bras de Mars, avec la devise : « Occuper, administrer, exploiter ». De là à dire que Bush y parviendra, il y a un long chemin. Surtout si l’on sait que cette guerre, pour la première fois, il devra la financer économiquement tout seul. L’invasion précédente de l’Irak avait été légitimée par la communauté internationale et payée par tous les pays. Cette fois-ci, il s’agit d’une invasion illégitime, un crime de lèse-humanité contre le monde civilisé, et les États-Unis la paieront seuls, sauf une petite partie qui sera prise en charge par le Royaume-Uni du renégat Blair. Tout cela représente beaucoup d’argent. Suffisamment pour déstabiliser encore un peu plus le maître de la petite machine à faire des dollars, installé dans le Département du Trésor de la nation la plus endettée de la planète : les États-Unis d’Amérique.
La stratégie militaire nazie
Une fois déterminés les objectifs royaux, Bush et sa bande de faucons ont patenté la stratégie militaire nazie : la tristement célèbre Blitzkrieg – la guerre éclair – avec laquelle les nazis ont dévasté l’Europe, combinant des attaques de divisions entières de tanks Panzers, appuyés par des vagues d’avions et des pièces d’artillerie. Les temps changent et la blitzkrieg nazie s’est transformée en super-blitzkrieg américaine, mais la modalité inventée par les maréchaux d’Hitler est la même que celle de Bush, bien qu’avec une puissance de feu mille fois supérieure.
Une autre ressemblance : le déséquilibre des forces en présence. L’invasion nazie de la Tchécoslovaquie et de la Pologne, où la cavalerie polonaise s’est heurtée à des tanks allemands après avoir été décimée par l’aviation, n’est rien en comparaison avec la puissance de feu infernale de la plus grande broyeuse technologique de l’histoire, comme si les Polonais s’étaient défendus avec des frondes face à la Luftwaffe de Goering. Lors de la première invasion de l’Irak, les pertes irakiennes se sont montées à 120 000 hommes contre 137 Américains morts et 7 disparus. Mise à part la Garde républicaine de Saddam, l’armée irakienne n’est plus composée que par des paysans faméliques sans entraînement, ni technologie, ni armement adéquat, face à plus de 300 000 soldats entraînés année après année pour tuer sans se poser de questions.
Que peut faire un pays qui a un budget militaire de 1400 millions de dollars contre un autre qui investit 400 000 millions de dollars annuellement dans ses Forces armées ? Et comme si cela n’était pas suffisant, Bush vient de demander encore quelque 75 000 millions de dollars de pourboire pour ce massacre. Il promet en échange que le butin de guerre compensera largement l’investissement.
Avant de commencer le massacre, l’armée irakienne a été saignée comme on saigne un taureau de combat quand il pénètre dans l’arène pour que le toréador coure moins de risques. Une décade de sanctions économiques, d’embargos, de manque de pièces de rechange, une armée sans avions, avec un nombre de tanks limité, peu de batteries anti-aériennes et seulement équipée de vieux fusils d’assaut AK-47, toutes ces mesures ont mis à genoux le taureau iraquien. Le toréador n’a plus qu’à plonger son épée et attendre l’agonie. Cependant les nouvelles du front ont démontré que, même saigné, le taureau a chèrement vendu sa peau.
Le vagabond viennois devenu prophète de la race aryenne, Adolf Hitler, a attaqué sans respect les grands trésors de l’humanité, détruisant des villes magnifiques, des cultures irrécupérables et des monuments fantastiques créés par l’être humain au fil des siècles. Imitant le protégé de sa famille, George Bush est entré à grand fracas dans le berceau de l’humanité, la Mésopotamie, l’Irak d’il y a 8 000 ans, « le pays entre les fleuves ». C’est là qu’est né le premier État, la première civilisation agraire et que l’écriture cunéiforme a été inventée. Dans le pays de la légendaire bibliothèque de Ninive, celui de la Tour de Babel, des jardins suspendus de Babylone, entre l’Euphrate et le Tigre, Bush se lance sans miséricorde dans la première guerre préventive du XXIe siècle. Il devra répondre lui aussi pour les trésors culturels qu’il a rasés. Son homo demens devra rendre des comptes à l’homo sapiens. Comme ce fut le cas pour Hitler et ses complices qui ont dû rendre des comptes à l’histoire au procès de Nuremberg.
L’ambassadeur des États-Unis d’Amérique en Uruguay dit dans son communiqué de presse en guise de réponse au journal La República être consterné par la comparaison de son président avec Hitler. Il explique que Bush est en train de faire en Irak la même chose qu’ont fait les USA en libérant l’Europe du nazisme.
Je pense que c’est une insulte à l’intelligence que de comparer le brillant auteur du New Deal, Franklin Delano Roosevelt, avec cet énergumène du pouvoir qui tue les idées au nom des idées, et les hommes avec.
Roosevelt est entré en guerre avec la légitimité que lui conféraient tous les peuples confrontés à la barbarie nazie. En premier lieu, le peuple soviétique qui a sacrifié sur l’autel du Moloch germanique trente millions de ses meilleurs hommes, femmes et enfants pour changer le cours de la guerre quand le Troisième Reich était encore invaincu. Bush fait comme Hitler et non pas comme Roosevelt. Bush viole toutes les lois internationales, il affronte les Nations unies et comme Hitler il envahit une nation pratiquement désarmée qui ne l’a attaqué à aucun moment.
De plus, il convient de préciser par rapport à ladite libération de l’Europe par les États-Unis, à travers le don héroïque de la vie des soldats américains, que l’entrée dans la conflagration fut très tardive, presque à la fin du conflit quand l’Allemagne était déjà usée par la résistance soviétique, qui se mesurait alors seule aux 95 % du potentiel militaire nazi concentré sur le front oriental. Les États-Unis furent les seuls bénéficiaires de la Deuxième Guerre mondiale, pendant et après le conflit. Pendant, comme l’explique si bien Heinz Dieterich dans La Republica, parce qu’ils développèrent, loin des champs de bataille, leur industrie et leur agriculture en augmentant les salaires réels de 1941 à 1945 de 27 %, en générant dix-sept millions de nouveaux postes de travail et en offrant en 1944 davantage de produits et services à leur population qu’avant la guerre. Après la guerre, ils demandèrent le prix de leur participation multipliée par dix. À Yalta, ils s’érigèrent en première puissance de la planète, prenant la place de l’Angleterre, bien que craignant aussi, il est vrai, l’Union Soviétique, son nouvel adversaire historique.
Et de même que nous affirmons qu’il est insultant de comparer Bush à Roosevelt, il convient de préciser qu’il ne faut pas non plus confondre les pères fondateurs de la démocratie américaine, ces héros de la liberté, George Washington, Abraham Lincoln, Thomas Jefferson, avec ce pédagogue du crime, ce plouc de la mort, qui à la télévision ne peut cacher son expression sournoise de lâche. Charles de Gaulle, courageux rebelle de la France anti-nazie, demandait un jour au grand philosophe Jean Guitton : « Qu’est-ce la lâcheté, maître ? » À ce puits de sagesse de répondre : « La lâcheté, Général, c’est de rechercher l’approbation et non la vérité ; les médailles et non l’honneur, la promotion et non le service rendu ; le pouvoir et non le salut de l’humanité. » Que cette réponse s’applique bien à notre nouvel Hitler qui dit défendre les Droits humains des Irakiens, alors qu’il se spécialise dans leur conversion en déchets humains !
Mais ce comportement nous surprend-il vraiment de la part d’un dirigeant qui nie ne pas vouloir sauver la planète de la dévastation en refusant de signer les protocoles de Kyoto, approuvés à l’unanimité par la communauté internationale ? Un dirigeant qui a rejeté le contrôle des armes bactériologiques parce qu’il estimait que l’accord pour éviter la prolifération de ces arsenaux portait préjudice à son pays. Un dirigeant qui exige des nations indépendantes qu’elles signent un document dans lequel elles renoncent à leur droit de juger des citoyens américains pour des délits commis à l’étranger. Un dirigeant qui refuse de signer et de participer à la Cour Pénale Internationale, créée récemment par la communauté mondiale pour juger les crimes de l’humanité. En rejetant une institution approuvée par plus de 190 pays, avec seulement 7 pays contre, son vote coïncide avec celui du pays envahi, l’Irak, qui lui non plus ne veut pas qu’il existe dans le monde une Cour Pénale de dix-huit jurés indépendants pour empêcher légalement que des crimes de guerre continuent à être perpétrés, tant par le gouvernement des États-Unis que par celui de l’Irak.
Que peut-on attendre d’un dirigeant qui, dans son propre pays, berceau des traditions démocratiques, a suspendu les droits civils, instauré la censure, les listes noires, l’élimination de l’Habeas corpus, droit pour lequel tant de générations ont donné la vie, imposant des jugements clandestins, des prisons secrètes, et le délit d’opinion, plongeant ainsi sa société dans la nuit noire du marasme le plus anachronique ?
Nationalisme et faux patriotisme
Malgré tout, il dispose actuellement d’une importante majorité silencieuse dans son propre pays en faveur de l’horreur de la guerre, au beau milieu d’une gigantesque panne intellectuelle dans la société américaine, provoquée par la désinformation, la déformation de la réalité érigée en système, la douleur légitime après l’attaque criminelle contre les Tours Jumelles qui a fait périr près de quatre mille êtres humains, et un nationalisme attisé par le Tartuffe de la Maison-Blanche. Le nationalisme et le faux patriotisme constituent un lien supplémentaire, une ressemblance de plus, le chaînon qui unit Bush à Hitler. Ce type de nationalisme est le dernier refuge des canailles qui sont soutenues par la culture des ignorants. Albert Einstein le décrivait fort bien : « Le nationalisme est une maladie infantile, la rougeole de l’humanité. »
Mais un mouvement populaire commence enfin à se développer depuis la base, la racine, dans les meilleures traditions civiles du peuple américain, pour s’exprimer dans les grandes villes, pour arrêter, avec l’énergie mentale engendrée par la conviction d’avoir raison, les crimes en série que la plus monstrueuse iniquité belliqueuse des dernières décennies est en train de construire. Le peuple américain, lentement il est vrai, commence à comprendre que « la liberté ne peut être fertile pour les peuples qui ont le front tâché de sang ».
Qui se décidera à arrêter ce psychopathe ?
C’est la question qui circule à travers toute la planète.
Les Nations unies n’ont pas pu le faire. L’OTAN non plus. Leurs alliés européens ont été trompés et humiliés. Mais du fin fond de l’histoire, l’antidote commence son incubation. Tous les empires et leurs prophètes ont glissé d’une victoire à l’autre jusqu’à leur écroulement final. Et cet empire tout comme son empereur, à qui il importe peu de gagner l’esprit et les c?urs des peuples du monde, qui est sourd ou feint la démence face à la révolte énorme du sens commun, devant le grand gémissement des sociétés sorti des entrailles exaspérées des multitudes, qui se sont jetées sur les routes du monde entier, clamant pour la paix et la cessation du massacre, cet empereur devra finalement comprendre que dans cette croisade le vainqueur n’obtiendra que les dépouilles.
Les hommes comme Bush pensent que les crimes s’enterrent et s’oublient. Ils se trompent car le souvenir des crimes survit. Les gens en ont assez de la violence. Ils en ont assez des vendettas misérables des uns contre les autres. Ils veulent mettre fin à l’ère des assassinats. Si on les conduit vers des impasses, ils réagiront.
Le discours sinistre du maître et de l’esclave se termine presque toujours par la férocité de l’esclave qui n’a plus rien à perdre. Spartacus dixit. La protestation continue dans tous les recoins de la planète. Il n’y a jamais eu d’empire aussi orphelin de soutien que celui incarné aujourd’hui par ce toxicomane du pouvoir. Cet immense mouvement mondial contre Bush seulement comparable au mouvement mondial contre Hitler fait face au strabisme classique des messies qui les empêche de voir la réalité. Le strabisme est une disposition vicieuse et malsaine des yeux qui fait que les deux axes visuels ne se dirigent pas en même temps sur le même sujet. Ils voient la réalité déformée.
Le chuchotement de millions de personnes peut se transformer en bras qui arrêteront cette folie.
Il ne faut pas avoir peur de ces géants qui ignorent les lois de l’histoire. Ils sont plus rusés qu’intelligents. C’est ce qui les renvoie au monde des dinosaures, ces animaux gigantesques qui avaient développé un corps énorme pour une tête minuscule. Quand les grands changements climatiques sont arrivés, leurs minuscules têtes n’ont pas su s’adapter. Contrairement aux moustiques.
Il existe un proverbe allemand qui se réfère à Hitler ainsi : « Quand tu vois un géant, étudie d’abord la position du soleil, il pourrait en fait s’agir de l’ombre d’un nain. » Nous ne savons pas encore quelle est la part de géant et quelle est la part de nain de notre nouvel Hitler.
Souvenez-vous de Gandhi, cet incendie moral qui alerta les consciences. Avec sa seule voix et sa conduite non-violente, il a mis à genoux l’empire le plus important de son époque. Gandhi disait que le silence des bons est le grand mal perpétré par les mauvais. Ce silence n’existe plus aujourd’hui. Tous les peuples, ceux des pays riches comme ceux des pays pauvres, gouvernés par la droite ou par la gauche, tous à l’exception de celui qui habite le pays agresseur, qui commence peu à peu à sortir de sa torpeur, tous ont pris conscience que pour la première fois au XXIe siècle, la guerre, en tant que croisade irrationnelle, peut changer l’humanité. Ils savent qu’une guerre injuste est une catastrophe qui paralyse et sclérose la rencontre de l’être humain avec l’humanité. Ils unissent leurs mains planétaires pour dire au tueur à gages de la Maison-Blanche qu’il existe une vie et une race moins sordide que la sienne. Et qu’il vaut la peine que nous nous levions pour la défendre.
Ceci est ma réponse, Monsieur l’Ambassadeur.
Montevideo, Uruguay, le 30 mars 2003.
Federico Fasano Mertens
Directeur du quotidien urugayen La Repúblic
trad.française:
http://www.reseauvoltaire.net/imprimer12294.html
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