Service public service privé? ni l’un ni l’autre!
Catégorie : Global
Thèmes : Luttes étudiantes/lycéennes
Service public ou service privé? Ni l’un Ni l’autre!
Aujourd’hui, Mme Valérie Pécresse, Ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche se déplace au Corum de Montpellier pour assister à la conférence intitulée « Biodiversité et Agriculture ; défis d’aujourd’hui, recherche de demain pour une agriculture durable ». Organisée dans le cadre de la présidence française de l’Union Européenne, cette conférence sera clôturée par une intervention de notre dévouée Madame la Ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche.
Ainsi, elle est ici pour vanter et promouvoir la politique des pôles d’excellence en général et celle de Montpellier en particulier.
Pour la plupart de la contestation syndicale, il s’agit ici de réagir contre la casse de l’enseignement supérieur et de la recherche, et plus généralement la casse du service public.
On voit alors s’ébaucher deux positions apparemment contradictoires:
> La position de la droite officielle, c’est à dire des capitalistes décomplexés: l’université n’est pas assez compétitive sur le marché de la connaissance. Elle constitue trop de dépenses au niveau de l’enseignement et pas assez de retombées (c’est à dire de bénéfices) au niveau de la recherche. Ainsi il faut la moderniser c’est à dire la rendre plus performante dans le cadre de la compétition mondiale du savoir, au nom d’un prétendu rayonnement national en fait au service d’un capitalisme national. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il faut qu’elle réponde plus (qu’elle ne le fait déjà) à l’impératif économique, en d’autre terme qu’elle soit un outil plus efficace des entreprises. D’où les stages en entreprises, la collaboration dans les pôles d’excellences entre université et industrie de pointe, financement des recherches en fonction des retombées économiques (ANR). C’est en gros la position de ceux qui sont à l’intérieur du Corum.
> La position syndicale type, réformiste corporatiste: l’université ainsi que la recherche doit rester indépendante, c’est à dire qu’elle doit être dépendante de l’Etat. Elle pourra alors accomplir sa mission de service publique. C’est à dire contribuer à l’avancée de la science, du savoir pour le bien de l’humanité. Or le bien de l’humanité n’étant pas le soucis premier des industriels, seul l’Etat pourrait garantir par le financement issue des impôts de l’ensemble des citoyens une institution au service de l’ensemble des citoyens. Les postes d’enseignants et de chercheurs doivent donc être pour ces raisons protégés de la logique capitaliste. Avant c’était pas trop mal, même s’il y avait des défauts, mais maintenant c’est de pire en pire. Il faut réagir! Tous on semble tous ensemble ouais, ouais…!
C’est d’ailleurs sur cette tendance majoritaire qu’ont eut lieux plusieurs Assemblées Générales: à la fac de sciences, au CNRS et à la fac de lettres (le 21 et le 28 octobre dernier).
Pourtant à y regarder d’un peu plus près, la contradiction ne se joue pas sur ce niveau… Si on en revient à l’histoire du fonctionnement universitaire dans le capitalisme français, il apparaît que jusqu’au début des années 1950, l’université était réservée à une élite. Ainsi il apparaît que la contradiction public/privé était plutôt une complémentarité…
Mais le capitalisme de plus en plus gourmand à l’époque des trente glorieuses a eut besoin de plus d’ingénieurs, de plus de mains-d’oeuvre diplômées, c’est à dire plus de cadres moyens et de petits cadres. Ainsi a débuté la « démocratisation » de l’université au frais de l’Etat, c’est à dire, des chers contribuables et en définitive sur la plus-value créée par les exploités… Etrangement encore une fois on ne peut que constater la remarquable complémentarité entre la demande capitaliste et sa réalisation par l’Etat par le biais de l’université… Hmmm étrange tout ça… On nous mentirait donc?!
Le problème dans cette démocratisation, c’est qu’elle s’est faite un peu à taton et que les dispositifs d’orientation et de formation n’étaient pas en bonne adéquation avec la demande du marché… Beaucoup trop de perte, étudiants mal formés, filières bouchées, recherche pas assez performante. Le pôle recherche développement à un prix (que les industriels rechignent à payer) et à court terme, il vaut mieux faire son marché chez ceux qui ont déjà trouvé, que chez ceux qui ne trouvent pas grand chose.
Il restait alors une solution: mieux intégrer l’université au marché du travail! Si en définitive les entrepreneurs ne sont pas satisfaits de ce que l’Etat fait pour eux, pourquoi ne pas plus les impliquer dans ce fonctionnement même; une fois que l’arbre a été planté, qu’il a été arrosé et que le fruit est bien mur, pourquoi ne pas le cueillir? C’est ainsi que depuis le début des années 1970 l’Etat laisse de plus en plus la place aux industriels, et se désengage quelque peu financièrement. Désengagement qui permet par ailleurs d’asseoir un peu plus la logique du marché et la soumission des universitaires aux industriels. Puisqu’ils sont aussi leurs financeurs et que ces financeurs contrairement à l’Etat n’ont pas à s’embarrasser de conserver leur électorat, de sauver les apparences du service public, ou de l’ascenseur social, la voie est libre pour une utilisation capitaliste de la recherche plus efficace! Par ailleurs c’est toujours à l’Etat de continuer à nous gaver de toutes sortes de sornettes: de progrès scientifique et d’égalité des chances…
Ainsi les services « publics », sont en fait au service du « privé », c’est à dire du capitalisme, étant donné qu’ils en font parti, qu’ils en sont un rouage!
Demander à l’Etat capitaliste de freiner le capitalisme national, c’est lui demander de se tirer une balle dans le pied, car premièrement il existe pour des raisons exactement inverses, et ensuite parce que sans ce capitalisme il n’a pas de « richesse » pour exister…
Mais alors pourquoi d’une part les syndicats demandent à l’Etat de se tirer une balle dans le pied et d’autre part comment est-il possible que certaines revendications aboutissent, c’est à dire sont accordées par l’Etat?
/ D’une part parce que les syndicalistes défendent des intérêts particuliers dans le cadre du capitalisme: un peu comme des aveugles qui veulent une place au soleil pour leur corporation (sans oublier leurs intérêts syndicaux) au sein d’un carnage généralisé. Il refusent de voir que par là-même ils contribuent à alimenter le fondement de la concurrence capitaliste, et que la crème de bronzage de cette place au soleil est la sueur et du sang des prolétaires… Ils se plaignent bêtement d’habiter au rez de chaussé, en évitant soigneusement de remettre en question l’architecture économique (dans laquelle ils ont droit à une petite chambre de bonne) contribuant ainsi avec brio à la crétinisation de la critique sociale et au désamorçage de la révolte des classes opprimées.
/ Par ailleurs l’Etat, est censé garantir la « paix sociale » indispensable au fonctionnement du capitalisme, or le procès du capitalisme et le procès de l’histoire, c’est la lutte des classes, c’est à dire la guerre sociale! Ainsi la négociation avec les syndicats est son arme afin d’étouffer l’émergence des mouvements révolutionnaires au sein de la classe dominée, par la distribution de miettes que les syndicats feront passer pour des « acquis sociaux ». L’idéologie se construit ainsi main dans la main…
> Il n’y a donc rien à demander ni rien à attendre de l’Etat capitaliste si ce n’est la gestion des conditions d’existence du capitalisme, en d’autres termes, l’étouffement des aspirations révolutionnaires.
> Il n’y a rien à attendre des syndicats qui ne sont là que pour négocier, sous une forme ou sous une autre, les termes de notre soumission au capitalisme par le maintien des institutions qu’ils défendent.
> Il n’y a rien à attendre des services publics étant donné qu’ils sont au service du capitalisme: l’université formes les petits cadres et les cadres moyens dont a besoin le capitalisme (participant aussi à la répression du savoir et à son découpage en fonction de la division capitaliste du travail), la recherche travaille pour le capitalisme (OGM, Nanotechnologie, Biotechnologie, labos pharmaceutiques,…), la police et la justice garantissent la propriété privé et fondent et luttent pour le maintien de la société de classes, la santé est en fait l’entretien du prolétaire, c’est à dire de la marchandise travail, par lui même (par le biais de l’Etat), sans oublier d’enrichir au passage l’industrie pharmaceutique…
Non seulement il est absolument absurde et illusoire d’attendre que les institutions capitalistes nous aident dans une perspective de changement radical, mais on peut plutôt s’attendre à ce qu’elles nous mettent des réformes dans les roues et des acquis sociaux sur la gueule…
C’est de nous-même qu’il faut attendre quelque chose! Et pour ça il faut sans cesse propager une analyse radicale du fonctionnement du capitalisme contre les fausses explications étatiques, syndicalistes, et autres réformistes de tout poils afin de s’organiser pour reprendre ce qui nous est confisqué à chaque instant: la jouissance de notre propre vie!
Assemblée Générale le 12 Novembre à l’université Paul Valéry à 12h00 à l’amphithéatre C,
ce sera l’occasion de réfléchir ensemble à la meilleure stratégie à mener…
Malheureusement, l’analyse syndicale et étudiante généralement assez superficielle étouffe pas mal les débats, mais on peut y rencontrer des personnes intéressantes, et c’est le seul endroit à ma connaissance sur Montpellier où il y a une AG.
PS: s’il y a un mouvement de contestation qui existe sur Montpellier, qui se forme ou qui est sur le point de se former, passez le dire à l’AG, ça pourra intéresser du monde!
Un RMIste enragé
5 Novembre 2008
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