Il n’y a aucun doute à avoir. Cet été, la bourgeoisie va asséner de rudes coups sur la tête de la classe ouvrière. Elle profite toujours de la période estivale et de la dispersion des travailleurs pour passer en catimini ses mesures d’austérité. Et cette année, les attaques s’annoncent particulièrement brutales.

« Un train de mesures et d’attaques »

Voici ce qui nous attend d’ici la rentrée de septembre :

• La réforme du code du travail va impliquer encore plus de flexibilité et d’insécurité. En particulier, la durée du temps de travail sera bientôt fixée « entreprise par entreprise ». Il s’agira donc de « Travailler plus pour mourir plus vite » (1) !

• La durée de cotisations va une nouvelle fois s’allonger (de 40 à 41 annuités). Tous ceux qui partent à la retraite constatent avec amertume la maigreur de leurs pensions. Les petits contrats précaires, la mise au chômage prématurée des « seniors », la faiblesse des salaires… tout cela induit des pensions minables (souvent proches des 800 euros). Dans l’impossibilité de vivre avec si peu, et avec l’augmentation drastique du coût de la vie, de plus en plus nombreux sont les retraités qui reprennent un travail… à 65 ou 70 ans  ! Car l’allongement de la durée de cotisation ne va pouvoir encore qu’aggraver la paupérisation des retraités.

• Dans le public, une pluie de suppressions de postes va s’abattre dès la rentrée sur les agents hospitaliers et des impôts, sur les enseignants et le personnel éducatif, etc. Dans le privé, les plans de licenciements s’amoncellent comme de gros nuages noirs. Chez Altadis, 2440 emplois sont d’ores et déjà menacés en Europe (dont 1060 en France) et plusieurs sites vont probablement fermer. Les ouvriers des secteurs de l’automobile et des banques risquent d’être particulièrement touchés par les conséquences de la crise économique mondiale qui ne cesse de s’aggraver. Bref, quoi qu’en disent les statistiques gouvernementales (2), le chômage va atteindre de nouveaux sommets.

• La bourgeoisie se prépare à durcir encore un peu plus le « droit des chômeurs ». Les chômeurs seront bientôt contraints d’accepter une « offre » d’emploi « raisonnable » ; étant jugé « raisonnable » tout travail situé dans un rayon de 60 km ou à 2 heures de transport du domicile. L’ouvrier aura donc le choix entre perdre toute allocation ou dépenser la maigre paye de son nouveau boulot en transport. Ce véritable chantage s’appuie, de surcroît, sur une propagande idéologique absolument répugnante considérant les chômeurs comme des fainéants, des assistés ou des parasites.

• L’accès aux soins va lui aussi continuer de se dégrader. Fin juin, le directeur de la Sécurité sociale a proposé de diminuer la part de remboursement de 100 à 35 % pour les médicaments dits « de confort » (sic !) (3) pour les 8 millions de malades atteints d’affections graves de longue durée (ALD). Momentanément, le gouvernement a désavoué ce directeur, mais cela indique clairement de quel tonneau frelaté vont sortir les mesures prévues vers le 15 juillet.

• Le gouvernement ose aujourd’hui faire passer sans vergogne à la télévision des publicités ayant comme slogan : « C’est mois après mois que nous gagnons la bataille du pouvoir d’achat. » Un site a même été tout spécialement conçu : www.mesurespouvoirdachat.gouv.fr. Il est vrai que depuis longtemps, la bourgeoisie a fait sienne la maxime du chef de la propagande nazie Joseph Goebbels, « Plus le mensonge est gros, mieux il passe », mais tout de même ! Quand la réalité vient démentir à chaque instant la propagande, certaines tromperies laissent un goût toujours plus amer en bouche. Entre mille exemples, les tarifs de la SNCF vont augmenter d’environ 15 %, ceux de la RATP de 3 %, et ceux du gaz de 9 % (après celle de 4 % en janvier et de 5,5 % en avril). Et les prix du pétrole et des produits alimentaires vont continuer de flamber inexorablement !

« Face à la crise, vive la lutte ! »

Ces attaques peuvent être ressenties comme un coup de massue. Mais, pour reprendre Karl Marx, il ne faut pas voir « dans la misère que la misère ». Au contraire ! Aujourd’hui, toutes les conditions sont réunies pour que la lutte se développe. Il ne s’agit pas là d’un vœu pieux mais d’une possibilité réelle. Partout dans le monde, la colère et la combativité de notre classe grandissent. A Dubaï, au Bengladesh, en Egypte, au Vietnam, en Roumanie, en Allemagne, aux Etats-Unis, etc. partout des grèves éclatent, partout les ouvriers se battent pour leur dignité (4). Dans ce journal, nous rendons compte d’une lutte à Turk Telekom, la plus importante en Turquie depuis 20 ans (lire page 5). Et cette dynamique est également vraie en France. En 2003, la lutte des enseignants contre la réforme des retraites annonçait le retour de la combativité ouvrière à l’échelle internationale. En 2006, en refusant un énième nouveau contrat précaire (le désormais célèbre CPE), les nouvelles générations étaient rejoints dans leurs manifestations par une large partie de la classe ouvrière et diffusaient en son sein un profond sentiment de solidarité. Elles indiquaient par-là même une méthode de lutte authentiquement ouvrière et porteuse d’unité : les assemblées générales souveraines ! Cette lutte est aujourd’hui encore un point de référence pour les ouvriers en lutte aux quatre coins du globe (5). En 2007, les lycéens s’appuyaient sur cette expérience pour s’organiser contre la loi LRU. Ils tentèrent en particulier de créer des passerelles en direction des cheminots, en lutte au même moment. Enfin, même si cette année 2008 n’a pas encore été marquée par une lutte d’ampleur, elle a connu une véritable effervescence sociale avec des grèves un peu partout et de multiples manifestations, confirmant ainsi le raz-le-bol généralisé dans les rangs ouvriers.

« Ne laissons pas les syndicats saboter nos luttes ! »

Aujourd’hui, la conscience de la nécessité de se battre tous ensemble grandit peu à peu. Il s’agit là d’un élément important, voire vital, pour la classe ouvrière. Il est de plus en plus évident que tous les secteurs et toutes les générations sont touchés. Se battre chacun dans son coin apparaît donc stérile, absurde et égoïste. Mais pour que ce sentiment de solidarité se concrétise dans la lutte, une chose est sûre, il ne va pas falloir compter sur les syndicats. Eux qui se présentent comme « les spécialistes de la lutte » ne sont rien d’autre, en réalité, que les chiens de garde du capital. Ils n’ont de cesse de nous diviser pour que leur maître règne. Le simple bilan de ces douze derniers mois en constitue une preuve édifiante.

A l’automne dernier, la connivence entre la CGT, la CFDT et Sarkozy fut si évidente qu’elle en ébranla même les troupes syndicales des cheminots qui huèrent copieusement Chérèque et Thibault lors de la manifestation du 20 novembre. Alors que la colère ouvrière était immense (chez les cheminots, mais aussi chez les enseignants, les infirmiers, les lycéens…), les syndicats ont freiné des quatre fers et ont fini par signer à la hâte des « accords » et à appeler à la reprise du travail. Le salut de Sarkozy aux organisations syndicales, lors de ses vœux de fin d’année, pour leur sens des responsabilités, en disait suffisamment long sur leur travail de sape des luttes ouvrières ! Ainsi, au printemps 2008, les syndicats ont divisé tant qu’ils ont pu en lançant tous azimuts des appels à diverses journées d’actions. Les secteurs ont été mobilisés les uns après les autres, le plus souvent chacun dans leur coin : les lycéens d’abord, puis les enseignants, puis les agents des impôts, etc. Les syndicats n’avaient qu’une seule peur : que les ouvriers se retrouvent ensemble dans la rue avec des revendications communes. Ils ont donc tout fait pour que cela n’arrive pas (6). Les manifestions du 10 et 17 juin sont venues clôturer cette longue série de mobilisations stériles en ne rassemblant que très peu d’ouvriers. Cette fin de mouvement atone et en ordre dispersé avait pour but d’écœurer et de décourager, en laissant traîner un sentiment d’impuissance et de résignation. Il ne s’agit pas là d’erreurs de stratégie mais d’une volonté claire et consciente. Ce sabotage systématique correspond à la nature profonde du syndicalisme. Les syndicats sont intégrés corps et âme au camp du capital depuis près d’un siècle ! C’est pourquoi la CGT peut bien annoncer, torse bombé, vouloir s’inscrire déjà « dans la mobilisation internationale du 7 octobre prochain pour porter toutes les revendications des salariés autour du thème du travail décent », nous pouvons être sûrs qu’à la rentrée, les syndicats vont continuer à nous poignarder dans le dos. Pour résister aux attaques, non seulement il ne faudra leur accorder aucune confiance, mais il faudra aussi oser prendre en main nos luttes, oser organiser nous-mêmes les assemblées générales, oser former des délégations pour aller à la rencontre de nos frères de classe dans les usines, les établissements scolaires, les administrations, les hôpitaux voisins.

Face aux attaques du capital,
prenons nos luttes en main.

Vive la lutte !

Vive la solidarité ouvrière !

Pawel – Courant Communiste International

1) Comme l’avaient déjà si bien dit, en juin 2007, les ouvriers en grève de l’usine Kronenbourg à Obernai, en réponse au fameux slogan de la campagne électorale de Sarkozy : « Travailler plus pour gagner plus » !

2) Comme le disait Mark Twain, l’écrivain et humoriste américain : « Il y a trois sortes de mensonges : les mensonges, les sacrés mensonges et les statistiques ».

3) Il s’agit, par exemple, des anti-nauséeux ou des anti-douleurs pour les cancers.

4) Lire sur notre site web (www.internationalism.org) les articles « La classe ouvrière multiplie ses combats dans le monde entier » et « Une seule classe, un seul combat ! ».

5) Tout récemment encore, par exemple, des étudiants en lutte au Maroc nous ont écrit pour savoir plus précisément et concrètement comment les étudiants en France s’étaient organisés au printemps 2006.

6) Pour connaître de façon plus détaillée les manœuvres syndicales de ce printemps, lire l’éditorial du journal de juin « Pour qui travaillent les syndicats ? ».