Hortefeux-de-camps (de « rétention ») dans un univers en expansion
Catégorie : Global
Thèmes : Immigration/sans-papierEs/frontieres
Olivier a un peu grossi. Il remonte le trottoir, avenue des Gobelins, « encapuchonné », accompagné de deux-trois léoniens.
Place d’Italie, 14 heures, samedi 5 avril.
Point de rencontre pour la manifestation contre les expulsions, les rafles, tout ce qui peut incarner le « droit-de-l’hommisme » le Nain dixit. Sur place, à peu près personne, hormis les partenaires très sociaux de Laurence Parisot : la CGT (et ses jolis drapeaux) s’agitent dans un coin, RESF sur un autre coin de la place d’It’, la FASTI (Fédération des Associations de Solidarité avec les Travailleurs Immigrés), Droits devant, la LCR et le PC frétillent à côté. La CNT a sorti ses traditionnels drapeaux bicolores, les autonomes ont investi dans le monochrome.
Place d’Italie, avenue des Gobelins.
L’immondice hissée sur le truck de la CGT est dégonflée quand l’animateur de son toit aperçoit, elle-aussi hissée, une banderole plus autonome, entre deux arbres de l’avenue. Quelques fumis indiquent l’obstacle aérien, mais les MC de la CGT parviennent à faire passer le combi-corbi’ ; l’air du boudin plastiqué cégétiste est expurgé, faut dire qu’en matière de dégonflage, on s’y connaît à la CGT.
Rue Claude Bernard.
Entrée dans le 5ème arrondissement, ses façades lissées, ses écoles illustres où se reproduisent les grands hommes. Moins illustres et plus susceptibles d’irriter la patrie (non) reconnaissante, des autonomes sortent une bannière « destruction des centres de rétention » ; ça dépote un peu plus que les formulations très courtoises généralement refourguées dans les manifs. Certes, nous sommes tous des enfants d’immigrés, il n’empêche que ce n’est pas le dévoilement de nos origines encadré par deux C-15 de la section Maine-et-Loire de la CGT qui changera grand chose aux politiques d’expulsions. La bienséance, voie royale du changement social.
C’est ce que devait également penser le postman évoqué plus haut. Il gambade gaiement sur le trottoir de l’avenue, à la recherche du temps que perdra peut-être (ou pas) son service d’ordre quand des non encartés auront la bonne idée de les doubler. Once again, le trotskysme bouffi, à contre-sens de la rue et de l’Histoire.
Rue d’Assas.
Rue parisienne longeant le Luxembourg où l’on apprend aux jeunes générations (d’héritiers méchés) le droit. Un caricaturiste de la bourgeoisie française pourrait y connaître les affres du priapisme observationnel. La droite française y fait son droit, la jeunesse rance y fait ses classes. Puisqu’il est question de « séparer le bon grain de l’ivraie » en matière d’identité nationale et que l’Institut Catholique est un haut lieu de désobéissance civile, les fumigènes allumés dans la rue par tous ceux qui ont eu la bonne idée de s’exclure de toute forme d’organisation « crédible et familiale » emplissent l’air et la rue, les « libérez nos camarades » leur font écho. Le seul rouge qui vaille (en manif et ailleurs), exception faite de l’aspect liquoreux de la chose, c’est bien les tubes à étincelles qui, hors des mains des footballeux-friendly, peuvent faire de la très ténesmique rue d’Assas une joyeuse maison close.
Angle boulevard Raspail, rue de Sèvres.
Loin, très loin du tintinnabulement des clochettes d’argent, le craquement sourd des fenêtres fracassées. Le modèle Porsche décapotable (toit fermé, toutes fenêtres ouvertes) stationné devant le Lutétia apparaît grâce ses concepteurs qui ont substitué au Rotring le burin.
Vous connaissez la théorie de l’expansion de l’univers ? Les galaxies s’éloignent les unes des autres. Par extension, les connexions synaptiques se dilatent dans un ordre de grandeur qui est inversement proportionnel du nombre d’entrées « légales » sur le sol français. « Du point de vue observationnel l’expansion se traduit par une augmentation de la longueur d’onde de la lumière dans le spectre des galaxies : c’est le décalage vers le rouge. » (1) Exact. Boulevard Raspail, un peu plus au Nord de la rue de Sèvres, les gaz utilisés par le service d’ordre de la LCR contre des autonomes qui tentaient de les dépasser connaissent également une réelle expansion.
…………
Post-dispersion à l’angle du boulevard Raspail et de la rue de Grenelle. (2)
A propos des échanges sur Indymedia relatifs aux « heurts » entre le service d’ordre de la LCR et les autonomes : à en lire certains, si la Marne est peuplée de poissons tout aussi morts que les Maliens qu’on y trouve en période printanière, c’est parce que les Black blocs ont infiltré le poste de contrôle des écluses. Breaking news : les blacks blocs sont aussi responsables de l’encadrement on board des sans-papiers sur les vols France/Afrique.
(1) Source : Wikipédia.
(2) En remontant le boulevard Raspail, outre les CRS qui se déploient « pour sécuriser le quartier » (sic- lancé place Le Corbusier par un sous-chef puant le pastaga et la crêtinerie mêlés), un fourgon d’I-Télé. Sorte de néo-combi en mieux qui a connu quelques travaux d’aménagement : inclusion de fenêtres à viseurs. Puisque le journalisme à la française est fondamentalement combatif et qu’il est une douloureuse (et permanente) remise en cause du pouvoir politique en place, certains ont dû estimer qu’il serait juste de mettre en conformité la tôle et le fond : l’objektiv-mobile fut agrémentée de quelques meurtrières.
Sculpture « inaugurale » d’ Alain Vuillemet, intitulée « Trou noir » (nécessaire dans un univers gazé/barré de rouge léonien)
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