Les trois singes du net… qui s’assoient sur vos libertés.
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Jamais la liberté d’expression et d’information n’aura été autant menacée sur le Net, qui est par ailleurs devenu l’outil de surveillance le plus
intrusif jamais mis en place dans une démocratie, puisque désormais, [toutes les activités des français sur le net sont
enregistrées->http://www.odebi.org/lct/Leslogspourlesnuls.html], et mises à disposition de la police qui peut en disposer sans même demander la moindre
autorisation à un juge.
La Ligue Odebi a il y a quelque temps publié [un bilan, faisant le point sur les atteintes aux droits et libertés sur internet durant le dernier
quinquennat->http://www.odebi.org/new2/?page_id=240], posant par ailleurs des questions très concrètes aux candidats. Ce bilan permet déjà de se faire
une idée des actions de la majorité sortante en général, et de Nicolas Sarkozy en particulier. A sa lecture, il devient évident qu’il est peu
raisonnable d’attendre de Nicolas Sarkozy qu’il réponde aux questions posées, sauf à ce qu’il se dédise et promette
aux électeurs le contraire de ce qu’il a fait…
Ségolène Royal, elle, pouvait bénéficier des apports de ce bilan, qui venait compléter les
lacunes importantes du rapport Rocard (qui au demeurant ne fait que proposer des recommandations, et non des engagements de la candidate).
Malheureusement, elle vient d’imposer un indéfendable blackout sur la publication de ces réponses.
Quant à François Bayrou, si les réponses sont rédigées, elles sont encore en cours de validation, car “particulièrement techniques” : Est-il si
difficile que ça de dire que l’on refuse le filtrage aux frontières, la limitation de la liberté d’expression par les intérêts économiques du secteur
audiovisuel (d’ailleurs, en passant: pourquoi ce secteur et pas celui des machines à laver?), ou encore la mise sur écoute numérique généralisée de tous
les français? Si l’on maîtrise ses dossiers, ce qui est le minimum qu’on puisse attendre à ce niveau, cela ne devrait pourtant pas poser de problème. Ou
alors y aurait-il des problèmes internes? François Bayrou devrait-il par exemple demander une autorisation de publication de ces réponses -au hasard- au
si fameux député Dionis?
Ce qui est étrange, c’est que quand il s’agit d’utiliser internet comme outil électoral, ces trois-là ont pourtant l’air de particulièrement maîtriser
le sujet… Le Net : Dans leur intérêt. Pas dans le vôtre.
En attendant, pour les électeurs, en matière de droits et libertés fondamentaux dans la société de l’information, tout se passe comme s’ils avaient en
face d’eux les trois singes de la sagesse hindoue, qui ne voient rien, n’entendent rien, et ne disent rien.
La seule différence est que ces trois singes-là n’attendent pas de chèques en blanc. Et à force d’attendre des chèques en blanc aux élections, on
obtient surtout des votes blancs.
La Ligue Odebi
http://www.odebi.org/new2/
Il y a un mois, la Ligue demandait aux dirigeants des partis politiques français de se positionner (point par point) par rapport au projet de loi de Nicole Fontaine.
Si les internautes sont des consommateurs qui ont le pouvoir de boycotter les produits de l’industrie phonographique, ils sont -en particulier en période électorale- aussi des électeurs, qui en toute logique considéreront les positions (ou les non-positions) des principaux acteurs de la vie politique française avant de décider de ce qu’ils feront de leur bulletin de vote.
La Ligue publie les positions officielles des différents partis dans leur ordre chronologique de réception . Voici donc la réponse du PCF (qui a répondu point par point directement dans le document que la Ligue lui avait envoyé):
La Ligue des Associations d’Internautes Haut-Débit demande aux dirigeants des partis politiques français de se positionner officiellement sur le projet de loi pour la « confiance » dans l’économie numérique, et les droits fondamentaux des citoyens dans la République Numérique.
Le 26 janvier 2004.
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Mesdames, Messieurs,
vous n’êtes pas sans savoir la révolte unanime, et d’ampleur sans précédent, que provoque la loi dite « pour la confiance dans l’économie numérique » portée par le ministère des finances, et qui entend entre autre régler la liberté d’expression sur le Net français. Les centaines de milliers de signatures recueillies par les diverses pétitions et actions de protestation contre ce projet de loi liberticide exigent désormais une réponse publique des principaux acteurs de la vie politique française.
Aujourd’hui, les citoyens numériques vous demandent de vous positionner publiquement et de vous engager clairement sur les points fondamentaux de ce projet de loi qui -en l’état- met en danger leur liberté d’expression et d’information, et nie leurs droits fondamentaux, tel celui d’accéder à une justice indépendante et impartiale.
Plus en détail , nous vous demandons de bien vouloir prendre position point par point :
Sous ce terme se cache en réalité et en pratique une privatisation de la justice du Net : Le projet de loi demande aux hébergeurs de juger et censurer les contenus du Net avant tout intervention de l’autorité judiciaire. Certains députés avancent que cela permettra de « soulager les tribunaux » (sic), et d’aller vite : En bon français, il s’agirait d’instituer une justice privée et expéditive. D’autres prétendent qu’il s’agit d’aller vite, mais que le juge pourra intervenir « a posteriori » : En bon français, on censure d’abord, on jugera plus tard.
Tout cela est inacceptable : Il revient simplement au Juge de juger. Si la justice doit aller vite, il convient simplement de lui en donner les moyens.
Alors que l’Union européenne interdit d’imposer une obligation générale de surveillance du Net aux intermédiaires techniques, le projet de loi joue sur les mots et impose une obligation de surveillance spécifique à certains contenus : En pratique, cela imposerait ni plus ni moins que de surveiller absolument tous les contenus circulant sur le Net (puisqu’il faut bien aller chercher le spécifique où il peut être : c’est à dire n’importe où à n’importe quel instant). Cela n’est ni raisonnable, ni réaliste. Par ailleurs, au plan des principes, cela reviendrait à imposer à des groupes privés d’effectuer des opérations de surveillance policière : ce serait contraire au modèle républicain, et génèrerait une ambiance pour le moins délétère sur le Net français.
Tout cela est inacceptable : C’est à la Police d’effectuer les opérations de Police. Les milices privées et les chasseurs de prime ne sont pas compatibles avec les valeurs républicaines .
En demandant aux fournisseurs d’accès de cesser de permettre l’accès à certains contenus, le projet de loi entend imposer en pratique un filtrage du Net aux frontières qu’aucune démocratie occidentale n’a à ce jour osé imposer. La réalité pratique est que ce filtrage est d’une part inefficace, et d’autre part empêcherait les internautes français d’accéder à des millions de sites parfaitement légaux hébergés à l’étranger. Si certains contenus sont intolérables, ce n’est certainement pas en faisant l’autruche que l’on pourra réellement les combattre (sauf à vouloir masquer une coupable inaction derrière le rideau de fumée de l’annonce de prises de mesures dont on chercherait à minimiser ou cacher l’inefficacité) . Il s’agit donc surtout d’une intolérable atteinte à la liberté d’information des français, sans compter qu’au-delà de son inefficacité, ce filtrage aurait un coût important, qui serait répercuté sur le montant des abonnements des internautes français : Ces derniers devraient donc payer pour une lutte inefficace contre des activités illicites ayant lieu à l’étranger… Enfin, l’Union européenne considère officiellement ce type de procédé comme attentatoire à la liberté d’expression.
A la demande de l’industrie du disque, la notion de correspondance privée serait supprimée de la définition de l’e-mail : Aucun internaute français ne peut accepter que l’on porte une telle atteinte à sa sphère privée. Le caractère privé du mail doit impérativement être réaffirmé clairement dans la loi si l’on veut que les français aient un minimum de confiance dans leur Net.
Même si certains avancent le prétexte politique de la lutte contre des contenus intolérables (incitation à la haine raciale, apologie de crimes de guerre, pédophilie) pour justifier ce projet de loi, tous les internautes savent désormais (cela a été publiquement dénoncé en particulier à l’assemblée) qu’il a en réalité été rédigé au seul profit des intérêts économiques de l’industrie phonographique qui tente d’en faire un outil de lutte contre le piratage.
En ce sens, et du fait des pressions exercées par cette industrie dans le seul but d’assouvir ses intérêts financiers, des acteurs du processus législatif envisagent de « concilier » la liberté d’expression des internautes avec les intérêts économiques de cette industrie : Pour les citoyens numériques il est clair qu’en ce qui concerne leurs droits fondamentaux il n’est pas envisageable de concilier, marchander, ou négocier quoi que ce soit !
– La liberté d’expression n’est pas marchandable.
– Le droit à une justice indépendante et impartiale avant toute censure n’est pas négociable.
– Le respect de la correspondance privée n’est pas marchandable.
En vous remerciant pour votre réponse, dont les citoyens numériques feront bon usage, veuillez recevoir nos salutations républicaines.
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remarques :
– j’ai mis les réponses du PCF en italiques et en retrait
– les questions de la Ligue Odebi en gras
Je trouve assez curieux que Odebi fasse une publicité dans cet article pour Agoravox, et ce simulacre de débat sur Internet, relayé notamment par Libération au service de la grande bourgeoisie.
Un prétendu débat à 4, voici ce que l’on peut en penser
– Fatigués du cirque Royal-Bayrou-Sarkozy-Le Pen ?
– Qui contrôle les débats électoraux sur la Toile ?
P. Bardet
Réponse de Francois Bayrou :
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À l’attention de la Ligue ODEBI.
Paris, le 20 avril 2007, par courrier électronique.
Vous m’avez adressé onze questions, ou proposé onze affirmations, concernant les libertés sur internet. Vous savez sans doute la part que j’ai prise dans la défense de ces libertés dans la bataille sur la loi DADVSI, au Parlement en 2005 et 2006. Je suis donc heureux de vous confirmer mon engagement sur ces sujets.
Tout d’abord, le principe de liberté d’expression du citoyen doit passer avant tous intérêts économiques. Si des intérêts comme ceux de l’économie culturelle sont, par définition, à prendre en compte dans la régulation de la communication “au public”, via internet comme ailleurs, cela ne saurait faire obstacle à la liberté d’expression du citoyen. Dans la “Loi pour la confiance dans l’économie numérique”, les intérêts économiques sont suffisamment pris en compte par la disposition sur le respect de la propriété.
La réglementation récente de la diffusion d’images sur internet n’est que l’un des exemples de la prolifération législative de ces dernières années : la multiplication de dispositions larges, floues, certaines inapplicables, d’autres contradictoires, affaiblit au final la loi elle-même.
C’est à juste titre que la ligue ODEBI pose les questions que pose la combinaison nouvelle entre, d’un côté les usages d’internet par les citoyens pour s’exprimer et agir, d’autre part les moyens d’investigation électroniques : défis pour nos libertés, enjeux de protection de la vie privée, questions que pose la permanence des informations numériques alors que les personnes décrites par ces informations vivent, changent d’opinions ou de pratiques.
Il a été envisagé de créer une commission étatique, ou para-étatique, pour contrôler une déontologie de l’expression sur le net : c’est un projet un peu étrange, qui témoigne du désarroi actuel sur le rôle de l’Etat et les relations entre l’Etat et les citoyens ; elle montre surtout que nous avons besoin de mieux comprendre le rôle de l’Etat dans la société de l’information. Car l’appareil d’État, même piloté par des personnes démocratiquement nommées, même externalisé en commissions associant les intérêts légitimes d’un secteur, ne se préoccupera pas des droits des citoyens à la place des citoyens. Dans un monde – physique et numérique – en mouvement rapide et général, l’État ne trouvera pas les réponses à la place de la société. La création, l’invention, l’ouverture de voies nouvelles, nécessitent une société de l’autonomie. Le travail réalisé par le Forum des Droits sur Internet, appréciable et apprécié, témoigne de cette capacité d’autonomie.
D’ailleurs, à quoi servirait le label que délivrerait cette commission ? Les sites internet n’ont pas besoin de dispositions fiscales similaires à celles qui permettent à la presse papier d’acheminer et distribuerses publications sur tout le territoire.
L’hébergeur d’un site peut constater, conformément au principe général selon lequel “nul n’est censé ignorer la loi”, la présence de contenus illégaux sur un site qu’il héberge ; il doit donc avoir la faculté de cesser sa contribution technique à la publication des contenus concernés. Mais il doit surtout avoir le droit, s’il doute du caractère légal ou illégal des contenus, de les maintenir en ligne, dans l’attente de la décision du juge qui serait saisi.
Le juge ne saurait en revanche, à mon avis, prescrire aux fournisseurs d’accès internet le filtrage de certains contenus ; serait-il raisonnable de réglementer dans ce sens, alors que certaines techniques de cryptage peuvent empêcher le fournisseur d’accès de connaître la nature du contenu auquel accède l’internaute ?
Le pouvoir de police doit rester, sur internet comme ailleurs, du ressort de la force publique. Quand, fin décembre 2005, un amendement de dernière minute au projet de loi DADVSI, a prétendu instaurer une “réponse graduée” ou “riposte graduée” qui confiait à des entreprises privées un premier niveau de surveillance et de police de l’internet (donc un droit d’intrusion dans les échanges de fichiers), je me suis battu à l’Assemblée, avec succès, pour faire échouer ce projet.
Des dispositions d’exception, qui confieraient à la police une autorité qui appartient normalement au juge, peuvent légitimement être prises à titre provisoire, en raison d’une menace singulière sur la vie de la nation ; c’est, par exemple, ce qui a été fait le 6 octobre 2001 par les amendements sur la “loi pour la sécurité quotidienne” (LSQ). Elles doivent rester l’exception, et la permanence d’une menace terroriste ne suffit pas à justifier qu’elles soient pérennisées.
Vous m’interrogez sur la copie privée et l’interopérabilité. Pour moi, la copie privée, pour un usage personnel, familial ou amical, doit être reconnue comme un droit pour le consommateur, pour le citoyen – et non pas seulement comme une “exception”. Affirmer les droits d’auteur et les droits voisins légitime une indemnisation de cette copie privée.
Que le législateur autorise un producteur d’équipements matériels ou d’oeuvres immatérielles à les assortir de certaines restrictions techniques d’usage clairement indiquées à l’acheteur, c’est une chose ; légiférer pour interdire le contournement de ces restrictions, c’en est une autre.
Pour moi, un usager qui acquiert des oeuvres auprès de différents fournisseurs doit avoir la possibilité de les utiliser sur différents équipements, de changer ses équipements, matériels ou logiciels sans être obligé de racheter les oeuvres. La législation ne peut pénaliser le contournement de mesures techniques de protection lorsque ce contournement a pour finalité une utilisation licite : lire une oeuvre achetée ou prêtée, effectuer des copies privées, assurer la sécurité informatique, par exemple. La loi devrait pénaliser les usages illicites, plutôt que d’incriminer les outils ou les techniques que certains utiliseraient à des fins illicites.
J’ai d’ailleurs dit à l’Assemblée, le 16 mars 2006, mon scepticisme quant à la mise en pratique de cette interdiction, quant à “l’idée bien étrange de construire une usine à gaz, avec des services de l’État qui, tels des pseudopodes, iraient partout contrôler la totalité des codes sources, des DRM transmis, importés ou transférés depuis un État membre de la Communauté européenne : nous ne la croyons guère réalisable.”
Le droit concernant les productions de l’esprit devra, selon moi :
• conforter les droits moraux des créateurs ;
• assurer aux activités culturelles un financement lié aux oeuvres ;
• favoriser la préservation de notre patrimoine culturel ;
• assurer l’égal accès aux ressources qui méritent d’être considérées comme des biens communs (dont des ressources pour l’éducation et la santé, entre autres) ;
• assurer au légitime détenteur d’un bien numérique, le libre usage de celui-ci dans le cercle privé, et sa libre préservation par des copies de sauvegarde.
Je vous prie de trouver ici l’assurance de mes sentiments les meilleurs.
François Bayrou
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Plus que deux singes