Affrontements hamas/fatah…
Catégorie : Global
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Depuis des décennies, les différentes organisations gauchistes, et en particulier les trotskistes, soutiennent « la juste lutte du peuple palestinien » contre « l’impérialisme américain et israélien » au nom du caractère « progressiste » des « luttes de libération nationale ». Aujourd’hui, les territoires palestiniens sont plongés en plein chaos par des luttes intestines. Depuis que le président de l’Autorité palestinienne a annoncé le 16 décembre dernier la tenue d’élections présidentielles et législatives anticipées, des affrontements armés ont lieu à Gaza entre factions rivales mettant aux prises d’un coté les islamistes du Hamas à la tête du gouvernement et de l’autre le Fatah du président Mahmoud Abbas. Les affrontements entre ces milices armées sont sanglants : combats de rue, attentats à la voiture piégée, enlèvements à répétition. Leurs règlements de compte meurtriers sèment la terreur et la mort parmi les populations de la bande de Gaza, déjà réduites à la misère.
Face à un tel déchaînement de violence et de barbarie, comment se positionnent les organisations trotskistes, telles Lutte Ouvrière (LO) ou bien encore la Ligue Communiste Révolutionnaire (LCR) ?
« Comment LO et la LCR soutiennent des cliques meurtrières »
Sans jamais avoir varié d’un iota, LO et LCR montrent du doigt les seuls coupables selon elles, à savoir les Etats-Unis et « l’Etat sioniste israélien ». LO dans l’article de son hebdomadaire du 6 octobre 2006 déclare : «Chaos et affrontement sont les conséquences directes des sanctions financières décrétées par l’Union Européenne, le gouvernement des Etats-Unis et celui d’Israël. » ou encore : « Or, c’est bien Israël et ses principaux tuteurs occidentaux qui sont les responsables de la situation désastreuse dans laquelle vivent les Palestiniens » (Lutte Ouvrière n°2003 du 22 décembre 2006). L’impérialisme est inhérent à la vie de chaque fraction nationaliste bourgeoise et s’exprime à travers une lutte pour la défense de l’intérêt du capital national entre tous les Etats concurrents, du plus grand au plus petit, du plus puissant au plus faible. A noter (n’en déplaise aux groupes trotskistes) que si le Fatah peut compter sur le soutien d’Israël, des Etats-Unis et de l’Union Européenne et que le Hamas est appuyé financièrement et armé par l’Iran et la Syrie, c’est justement en tant que cliques bourgeoises palestiniennes.
Ainsi, en soutenant soi-disant « tous les Palestiniens », LO encourage en fait la classe ouvrière à se ranger derrière des cliques bourgeoises et à s’enrôler comme chair à canon au nom de la défense de la patrie palestinienne. C’est toujours ce que défend cette organisation qui, comme l’ensemble des groupes trotskistes, ne désigne comme impérialistes que la politique de certaines nations, de certains Etats.
Quant à la LCR, elle ne s’encombre pas de formulations hypocrites en clamant tout haut son soutien direct non au « peuple palestinien » en général mais directement à telle ou telle fraction, à telle ou telle milice. Au lendemain des élections dont le Hamas est sorti victorieux, un communiqué de la LCR du 26 janvier 2006 déclarait : « Fondamentalement, les gouvernements israélien, celui de Sharon en tête, et les USA portent une lourde responsabilité dans ce que certains appellent ‘un séisme politique’. Cette politique musclée de Mrs Bush et Sharon ont déconsidéré les dirigeants du Fatah et fait le jeu du Hamas. » Les organisations trotskistes ont un besoin viscéral de choisir constamment un camp bourgeois en présence, dans toutes les guerres, dans tous les conflits. Et cette politique tourne ici purement au ridicule. C’est ainsi qu’on a assisté en un an à un glissement progressif de ce soutien du Fatah vers le Hamas de la part de la LCR : « Les États-Unis et Israël tentent de renforcer le président de l’Autorité palestinienne, (…) afin d’affaiblir le gouvernement Hamas, massivement élu et toujours soutenu par la majorité des Palestiniens » ou encore plus explicitement, « C’est l’arrière-fond des confrontations sanglantes à Gaza de ces dernières semaines entre des militants du Fatah et des militants du Hamas, et dont le Fatah porte l’entière responsabilité » (souligné par nous).
Cette politique de girouette crée un désarroi dans le courant trotskiste, ce dont témoignent les furieuses empoignades sur le forum des marxistes révolutionnaires (http://forumtrots.agorasystem.com/lcr animé et contrôlé en sous-main par la LCR). Alors que la guerre fait rage entre fractions palestiniennes, la préoccupation des intervenants consiste à choisir l’une de ces fractions afin que le peuple palestinien, dans la boue et le sang, puisse enfin trouver le chemin de sa « libération nationale ». Pour certains, il faudrait soutenir le Fatah qui serait progressiste. Pour d’autres, au contraire, et pour les mêmes raisons, il faudrait soutenir le Hamas.
Petit florilège, l’un avance : « L’une des fractions est nationalistes bourgeoises et l’autre représente le fascisme vert. Je préfère le Fatah ! » Un autre lui répond : « Ce qu’on voit de façon assez claire dans cette crise, c’est quand même le Fatah passant un seuil dans le rôle de supplétif de l’impérialisme, en condamnant le gouvernement Hamas […] et en cherchant par tous les moyens à le déstabiliser ».
Un troisième point de vue s’exprime : « Le Hamas ne défend pas la bourgeoisie ni le fascisme mais bien un système féodal basé sur l’obscurantisme religieux tandis que la Fatah, nationaliste laïque […] défend un Etat souverain dirigé par une bourgeoisie nationale […]. Moi, je choisis le FPLP. »
Un autre sympathisant trotskiste renchérit : « Même si le FPLP soutient le Hamas ? » Réponse du précédent : « En l’absence d’une organisation marxiste et révolutionnaire capable de peser sur le cours des événements j’apporte mon soutien critique à qui je peux ! Et donc au FPLP en l’occurrence… »
Au nom de la démocratie, la LCR laisse cyniquement ces arguments sans réponse. Et pour cause, la cacophonie du débat n’est que le reflet de leurs propres contradictions.
« Internationalisme prolétarien contre nationalisme bourgeois »
Lutte Ouvrière et la Ligue Communiste Révolutionnaire évitent soigneusement de poser la question : où se trouve la défense des intérêts de la classe ouvrière, en Palestine, en Israël, ou ailleurs dans le monde ? L’exploitation féroce de la classe ouvrière par la bourgeoisie palestinienne et israélienne a, comme par enchantement, disparu. La « défense de la patrie palestinienne, au nom des justes droits des Palestiniens » est martelé comme un mot d’ordre mobilisateur à destination de la classe ouvrière dans le bourbier inter-impérialiste. De ce fait, les officines trotskistes déversent le pire poison nationaliste dans les consciences ouvrières. Chaque bourgeoisie, palestinienne comme israélienne, appelle les ouvriers vivant sur son sol à participer à la guerre. D’un côté, il faudrait lutter pour « la juste cause du peuple palestinien », de l’autre, il faudrait, « défendre Israël contre la menace du fanatisme du monde arabo-musulman. » Quelles sont les conséquences pour les ouvriers qui vivent en Palestine, comme en Israël, d’une telle position ? Quelle doit être l’attitude des ouvriers partout dans le monde face à ce conflit ? L’idéologie nationaliste est-elle une arme de combat de la bourgeoisie ou de la classe ouvrière ? Ces questions et les réponses qui en découlent ne sont pas secondaires pour la lutte de classe, bien au contraire, elles sont vitales pour le développement du combat de classe et de la conscience prolétarienne.
Partout les ouvriers ont les mêmes intérêts à défendre, contre la même classe d’exploiteurs. Cela ne signifie qu’une seule chose pour la classe ouvrière : aux guerres impérialistes et nationales de la bourgeoisie, le prolétariat ne peut opposer que sa guerre de classe et son unité internationale. Rosa Luxembourg, une des plus grandes figures du prolétariat révolutionnaire, l’affirmait déjà haut et fort il y a près d’un siècle : « A l’époque de l’impérialisme déchaîné, il ne peut y avoir de guerre nationale. Les intérêts nationaux ne sont qu’une mystification qui a pour but de mettre les masses populaires laborieuses au service de leur ennemi mortel : l’impérialisme. » (1) Sous couvert de bons sentiments et au nom de la défense d’une patrie palestinienne où les droits du peuple seraient respectés, voilà à quel sale travail s’attellent des organisations comme LO ou la LCR. Pire ! Quand elles ont en face d’elles des organisations défendant de façon réelle et vivante l’internationalisme prolétarien, elles les traitent « d’indifférentistes ». La seule position marxiste et révolutionnaire possible est celle que réaffirme un sympathisant des positions de la Gauche communiste intervenant dans le Forum trotskiste : « Ce qui se passe à Gaza montre encore une fois le danger que représente l’idéologie nationaliste pour la classe ouvrière. Quand la classe ouvrière est empoisonnée par cette idéologie, cela amène toujours celle-ci à s’entretuer entre elle pour des intérêts qui ne sont pas les siens. On l’a vu en 1914, lors de la deuxième guerre mondiale, lors des conflits entre le bloc de l’Est et le bloc de l’Ouest. Aujourd’hui avec la dislocation de l’Autorité palestinienne, on amène les ouvriers palestiniens à s’entretuer entre eux au nom du fait que tel ou tel camp serait progressiste. Alors que tous les camps en présence défendent une cause nationale qui n’est pas le terrain de la classe ouvrière. Face à cette situation encore une fois le cri de guerre du mouvement ouvrier doit être mis en avant : « LES PROLETAIRES N’ONT PAS DE PATRIE ! ».
Tino – Courant Communiste International
(1)Thèses sur la démocratie internationale.
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